Leur frustration est compréhensible, mais les partisans du Canadien qui ont hué leur club, samedi soir au Centre Bell, devraient tirer une leçon de la belle victoire de l'Impact en finale de la première division des USL. Et se souvenir des vertus de la patience.

Au-delà de l'absence coûteuse du meilleur joueur de l'équipe, Andrei Markov, et même si Carey Price se contente trop souvent d'être correct quand il lui faudrait être brillant, le temps est la principale chose qui a manqué au Canadien jusqu'ici.

Cela fait à peine plus d'un mois que le camp d'entraînement de l'équipe s'est mis en branle et que Jacques Martin a commencé à travailler avec les joueurs que Bob Gainey lui a fournis. Cela ne fait pas trois semaines que le coup d'envoi de la saison 2009-2010 a été donné. Le CH a joué un grand total de sept parties.

Mais voilà, les cinq derniers de ces matchs se sont terminés par des défaites. Le CH n'a marqué que neuf buts au cours de cette série de revers. Et déjà, on sent poindre le doute et la frustration dans le coeur des amateurs.

Disons-le: à Montréal, on a la mèche courte. Marc Dos Santos en sait quelque chose. L'entraîneur de l'Impact a remplacé John Limniatis dès la fin mai, mais les déboires de l'Impact n'ont pas cessé immédiatement, loin de là. Ce n'est qu'en août que le club a finalement trouvé l'erre d'aller qui l'a conduit au troisième titre de son histoire, devant une salle comble au stade Saputo, samedi après-midi.

«J'espère que Montréal va apprendre à donner du temps aux entraîneurs, que ce soit au hockey, au football ou au soccer, a commenté Dos Santos, au bord du terrain, après la victoire de l'Impact aux dépens des Whitecaps de Vancouver. Les résultats ne viennent pas en deux semaines ou en un mois.»

Les insuccès initiaux de l'Impact ont provoqué des grognements. Pourquoi avoir remplacé un soldat loyal comme Limniatis, qui avait tout de même conduit l'équipe jusqu'en quart de finale de la Ligue des champions, par un jeune blanc-bec arrogant sur les bords, si c'était pour voir le club continuer à perdre?

Même le président de l'équipe, Joey Saputo, a reconnu qu'il s'était posé des questions au cours de l'été. «Si j'avais été à la place (du directeur technique) Nick DeSantis, j'aurais fait des changements, mais Nick m'a dit «je crois en l'équipe, prends le temps et tu vas voir, c'est une équipe de champions».»

De fait, lentement mais sûrement, Dos Santos a installé son système de jeu. Il a redonné confiance à ses joueurs, encore hantés par le spectre de leur débandade printanière contre Santos Laguna. Si bien que l'Impact a perdu un seul de ses 14 derniers matchs.

«Au début, (les critiques) étaient un peu injustes, a dit Dos Santos, samedi. J'avais pris une équipe qui n'était pas la mienne, une équipe avec d'autres habitudes. Et tout le monde voulait des résultats. Mais le sport, ce n'est pas comme ça. Ça prend du travail. Il faut donner une idée, une méthode, un modèle à une équipe. Ce n'est pas comme en cuisine où tu fais tes oeufs en cinq minutes. Moi, je les fais en 20 minutes.»

Bref, il a fallu donner le temps au temps. «On a stabilisé un peu l'alignement et le système de jeu, le message a été répété et on a commencé à mieux l'appliquer et à mieux le comprendre. Ça prend du temps à établir une cohésion», souligne le milieu de terrain Patrick Leduc.

C'est vrai au soccer. Ça l'est aussi au hockey - surtout pour une équipe rebâtie de fond en comble comme l'a été le Canadien cet été.

C'est vrai, le Canadien ne marque pas assez de buts. Il en arrache en avantage numérique (24e dans la LNH avec 15,4% d'efficacité). Il se fait battre trop souvent en infériorité numérique. Mais à part la déroute à Vancouver, il reste généralement dans le coup. Il lui arrive même de dominer complètement l'adversaire, comme ç'a été le cas pendant la première période de la défaite de 3-1 contre les Sénateurs, samedi.

Il lui reste à trouver le moyen de capitaliser sur ses chances de marquer - le match de samedi aurait pris une tournure différente si le trio Gomez-Cammalleri-Gionta avait marqué lors de son étourdissante première présence - et surtout, de respecter les exigences de Jacques Martin pendant 60 minutes.

Ça ne remplacera pas l'irremplaçable Andrei Markov, on en convient tous. Ça ne rendra pas Hal Gill et la brigade défensive plus rapides. Ça ne rendra pas Andrei Kostitsyn moins «énigmatique». Mais ça devrait permettre au CH d'être ce qu'il est: un club qui peut se faufiler en séries éliminatoires, si les astres s'alignent. Pas plus, pas moins.

Encore faudrait-il qu'on lui en laisse le temps.