Quoi de neuf? Eh bien, rien du tout! Malgré le tintouin qu'on a fait autour de l'environnement, c'est encore l'économie qui constitue le principal souci des électeurs. Comme d'habitude à cette différence près que la crise financière aux États-Unis provoque une inquiétude plus marquée qu'en temps normal.

Selon un sondage publié par Angus Reid, 30% des Canadiens (et 36% des hommes) estiment que l'économie est le principal défi auquel est confronté le Canada; pour 20% (et le quart des femmes), ce sont les services de santé; l'environnement est le problème numéro un pour seulement 15% des Canadiens.

 

L'Afghanistan? 3%. Le chômage? 4%. Le terrorisme arrive ex aequo avec l'«unité nationale» qui est la priorité d'à peine un Canadien sur cent!

Au Québec, les chiffres sont un peu différents, encore que ces sondages nationaux sont à prendre avec des pincettes quand il s'agit des provinces, faute d'échantillon suffisant. La préoccupation pour l'économie ne serait le fait que de 21% des Québécois, ex aequo avec la santé, l'environnement étant une priorité pour 17% des gens Cela, faut-il dire, ne se reflète aucunement dans les préférences électorales. Au Québec, les libéraux, avec leur Tournant vert, sont au plus bas, alors que le parti qui monte c'est celui qui ne s'en préoccupe pas!

Pour ce qui est de l'ensemble du pays, les inquiétudes des électeurs quant à l'économie devraient en principe favoriser le Parti conservateur, qui fait campagne sur la saine gouvernance plutôt que sur des sujets plus novateurs.

Rien ne change, en effet Comme d'habitude, libéraux et néo-démocrates rivalisent de zèle: c'est à qui empièterait le plus sur les champs de compétence provinciale.

Stéphane veut créer un Fonds doté de 420 millions «pour que chaque Canadien ait accès à un professionnel de la santé». (sic)

Ce fonds accroîtrait les ressources dédiées à la formation des médecins, des infirmières et des techniciens médicaux, et accorderait un soutien financier aux médecins et autres professionnels formés à l'étranger pour les aider à obtenir leur accréditation canadienne plus rapidement. Ce sont là clairement des domaines qui relèvent des provinces, et, dans le dernier cas, des ordres professionnels.

Non content de s'ingérer dans un domaine qui ne le regarde pas, le chef libéral promet de «récompenser» les étudiants en médecine qui choisissent des spécialisations comme la médecine familiale, la médecine en milieu rural et la gériatrie.

Le fédéral, on le sait, n'a aucune expertise concrète en matière de santé, et cela paraît dans ce programme libéral manifestement rédigé sur le coin d'un bureau.

Qu'est-ce que c'est que «la médecine en milieu rural»? Les agriculteurs ont-ils des cerveaux et des artères différents de ceux des urbains? Peut-être voulait-on plutôt parler des médecins qui s'établissent en milieu rural. Mais qu'est-ce que le PLC connaît aux besoins des provinces? Sait-il seulement si toutes les provinces ont les mêmes besoins? Et pourquoi arbitrairement cibler la gériatrie? Qui sait si le vieillissement de la population ne nécessitera pas plutôt une augmentation des cardiologues, des ophtalmologistes ou des orthopédistes? Tous les vieux ne sont pas «alzheimer», la plupart n'ont pas besoin d'un gériatre!

La même improvisation - et le même désir de centralisation - se retrouve dans le programme du chef néo-démocrate.

Lui aussi fait valser les millions. Il veut en consacrer 200 chaque année pour augmenter de 1200 par année le nombre d'étudiants en médecine, de 6000 le nombre d'étudiants en nursing, et pour effacer les prêts de ceux qui s'engageraient à pratiquer la médecine familiale pendant leurs 10 premières années d'exercice.

Évidemment, parler de «médecine familiale», ça fait bien, c'est sympathique, ça fait plaisir aux familles. Mais que connaît le NPD des besoins des provinces à ce chapitre? Qui dit que dans cinq ans l'on ne fera pas face à une grave pénurie de spécialistes dans certains domaines? Quelles charges financières cet afflux d'étudiants décidé à Ottawa feraient-elles peser sur les provinces, qui ont la responsabilité de gérer le système?

Quant aux professionnels diplômés à l'étranger, ces deux partis s'imaginent-ils qu'ils ont la baguette magique pour régler ce problème complexe? C'est bien beau de vouloir «faire sortir les médecins étrangers de leurs taxis» (dixit Layton), mais encore faut-il savoir où et comment ils ont été formés!