Le maire Tremblay, qui était déjà incapable de s'acquitter de ses fonctions normales, va quintupler sa tâche! Lui qui n'arrivait jamais à savoir ce qui se passait dans son administration, ni à se brancher sur les sujets le moindrement controversés, sera maire de la ville, président du comité exécutif, maire du centre-ville, responsable des relations internationales, du «capital humain» (?) et de la jeunesse!

Jean Drapeau, pour ne nommer que lui, ne se serait jamais passé d'un homme de confiance au comité exécutif pour gérer la ville au jour le jour. Pourtant, Drapeau était autrement plus solide que l'être pusillanime qui veut aujourd'hui mettre la main sur tous les volants à la fois.

 

Des esprits charitables ont vu dans cette main-mise sur le pouvoir le signe que M. Tremblay, échaudé par les rumeurs de scandale, veut dorénavant tout contrôler. Quelle illusion! Les dossiers d'une métropole sont trop nombreux et trop complexes pour qu'une seule personne, fût-elle un génie doublé d'un administrateur hors pair, puisse les assimiler. À son âge, M. Tremblay ne changera pas. Alors qu'il faudrait une poigne de fer et une énergie à tout casser pour jongler avec cet échafaudage de pouvoirs, Gérald Tremblay restera le gentleman naïf, influençable et timoré qu'il a toujours été.

Et ce n'est pas tout! Il fait entrer deux conseillers de l'opposition au conseil exécutif, comme si Union Montréal ne détenait pas la majorité au conseil et comme si lui-même n'avait pas obtenu la majorité des votes. Même les gouvernements minoritaires ne forment pas ce genre de coalition. Imagine-t-on Jean Charest, en 2007, amener des péquistes dans son cabinet? Pourquoi ce camouflet à la majorité des électeurs?

Le maire vient ainsi de rendre la ville encore plus ingouvernable, car quoi qu'en disent les utopistes, on ne peut pas gérer quoique ce soit, même pas une binerie de coin de rue, dans une transparence absolue. Or, la présence de membres de l'opposition rendra le huis clos impossible. À moins, évidemment, que l'opposition, placée dans un insoutenable conflit d'intérêts, décide de renoncer à jouer son rôle pour s'agglutiner au pouvoir, et fasse passer la solidarité «ministérielle» avant la loyauté au parti.

Cerise sur le sundae, la nomination du bizarroïde Richard Bergeron. Pourquoi introduire un tel électron libre au coeur de l'exécutif, quand il suffisait de lui emprunter quelques idées urbanistiques?

Preuve, si besoin était, de la faiblesse congénitale du maire Tremblay: il a acheté la théorie de ceux qui, prenant prétexte du faible taux de participation, lui ont fait croire qu'il n'avait pas de légitimité électorale, n'ayant été élu «que par 16% de l'électorat».

Cette théorie fumeuse n'est jamais utilisée en politique: la victoire émane des votants, c'est tout. Autrement, il faudrait démettre tous les conseils des hôpitaux et des commissions scolaires, aux élections desquelles participe un nombre infime de gens. Selon le même calcul, la présence à l'exécutif de M. Bergeron, dont la candidature a été rejetée par neuf électeurs sur 10, ne se justifie pas.

La réalité c'est que M. Tremblay a été le choix de 38% des électeurs, avec, respectivement, six et 13 points d'avance sur Louise Harel et M. Bergeron. Le taux de participation, à 39,4%, n'avait rien d'exceptionnellement bas; il était au contraire supérieur de plus de quatre points à celui de 2005.

Je n'ai pas voté pour M. Tremblay, mais il ne me serait jamais venu à l'idée de contester la légitimité de sa victoire. Qu'il le fasse lui-même en s'inclinant face contre terre devant ses critiques et en se couvrant la tête de cendres comme un grand pénitent, est vraiment pathétique.