Je me demande ce que «Joe le plombier» en a pensé.

Apparemment, ce n'est même pas juste un symbole. CNN dit qu'il existe vraiment. Que tout est parti d'un vrai gars que Barack Obama a rencontré la semaine dernière en campagne à Holland, en Ohio...

Je me demande si les chaînes de télé américaine vont tenter d'aller le chercher dans son salon en train de boire quelques bières avec «Joe Six Pack» - autre monsieur Tout-le-Monde, amateur de bière celui-là, et amené dans la campagne par Sarah Palin - car il en a pris de la place hier.

 

John McCain, candidat républicain, s'est inquiété de ses impôts, de ses paiements obligatoires d'assurance maladie, de ses obligations comme employeur...

Dès les premières secondes du troisième débat contre Obama, McCain a sorti Joe le plombier de son chapeau et s'est mis à nous en parler en long et en large comme si une mini Palin, cette colistière qui prend de plus en plus des airs de coach en populisme, lui faisait des clins d'oeil sur son télésouffleur.

Joe n'aime pas vos mesures financières, a-t-il lancé au candidat démocrate.

«Il regarde ça et il se dit qu'il va payer plus d'impôts!»

Joe n'a pas à s'inquiéter, a répliqué Obama tout de go. Joe ne paiera pas plus d'impôts. «Tous ceux qui gagnent moins d'un quart de million ne paieront pas 10 cents d'impôts de plus», a dit le sénateur de l'Illinois.

Mais le ton du débat était lancé.

McCain avait décidé d'attaquer.

Parfois en compagnie de Joe le plombier.

Parfois tout seul, en lançant toutes sortes d'accusations au sénateur de l'Illinois, sur des sujets aussi différents que l'avortement ou les finances publiques.

Si ce débat avait été un match de tennis, on aurait vu Obama faire de longs et efficaces lobs défensifs, tassé dans le fond du terrain, toujours capable de répondre adéquatement, toujours capable de retourner la balle. Mais jamais assez proche du filet pour faire des smashes à son tour. Alors que McCain, lui, lançait des citations-chocs comme: «Je ne suis pas le président Bush. Si vous vouliez faire campagne contre le président Bush, vous auriez dû le faire il y a quatre ans!»

À un moment, McCain a même poussé le sénateur Obama à décrire toutes les fois où il avait voté contre son parti et les groupes d'intérêt défendus par son parti. Officiellement, c'était parce que McCain voulait mettre son adversaire au défi de prouver son indépendance d'esprit. En réalité, il venait juste de demander à Obama de rappeler à tout le monde ses décisions impopulaires...

Touché...

Obama était même encore sur la défensive de la question précédente quand McCain a de nouveau attaqué en l'obligeant à se justifier au sujet de son amitié avec Bill Ayers, cet ancien militant extrémiste contre la guerre du Vietnam, dont l'amitié avec Obama a fait l'objet de toute une longue publicité négative de la part de la campagne républicaine. (Le sujet allume beaucoup les Américains.)

Re-bing! Obama était de nouveau dans le fond du court à retourner les balles.

Mais avec ses phrases bien construites, ses explications claires, son éloquence toujours frappante face à cet adversaire à l'allocution hachurée comme s'il était parfois sur le point de perdre le souffle, Obama ne s'est jamais pris les pieds dans le tapis.

Son jeu est même resté élégant.

Il a répondu, répondu, répondu encore.

Et il a pas mal ramassé toutes les balles. Même celles dans le fin fond des coins.

Reste juste à savoir ce que Joe, lui, en aura pensé.