Louise Harel était dans une forme splendide. De bonne humeur, souriante, détendue. Même son anglais était moins hésitant.

Depuis sa défaite dimanche, elle était invisible. Deux jours de silence. Hier, elle a convoqué les médias. La salle était pleine à craquer. Tous les journalistes avaient la même question en tête : part ou part pas ?

Louise Harel a été catégorique. «Je reste.»

- Pendant quatre ans ?

- Oui, a-t-elle répondu. J'assume cette responsabilité avec un certain sens du devoir. Je le fais avec plaisir aussi, je ne suis pas masochiste.

J'ai des doutes. Louise Harel a été ministre pendant des années. Elle a même été responsable de Montréal. Elle a piloté le dossier explosif des fusions. C'était elle le patron, le grand patron qui redessinait les structures des villes. Elle que les maires appelaient ou suppliaient pour obtenir plus d'argent.

Et aujourd'hui, elle accepte, sans ciller, de passer les quatre prochaines années dans le rôle ingrat de chef de l'opposition ? Elle devra se taper toutes les réunions du conseil municipal où la moitié des élus bâillent ou jouent avec leur BlackBerry ? À 63 ans ?

«Elle est bien capable de rester pendant quatre ans pour avoir sa revanche. Elle a la tête dure», m'a confié un de ses collaborateurs.

Si Louise Harel reste, c'est une bonne nouvelle pour les Montréalais. Armée de sa longue expérience parlementaire, elle va peut-être réussir à insuffler un peu de dignité dans ce conseil qui tourne trop souvent à la foire d'empoigne.

Et Vision Montréal a besoin d'un bon coup de fouet. Il ne faut pas perdre de vue les racines de ce parti créé par un homme narcissique, Pierre Bourque. Un parti qui a toujours cultivé une vision impressionniste de la démocratie. Un parti qui sort de la campagne électorale endetté, exsangue, désorganisé.

Vision Montréal a besoin d'une femme d'expérience comme Louise Harel. Sauf qu'elle restera six mois, un an peut-être, deux à tout casser. Chose certaine, elle ne sera pas là en 2013, mais elle ne peut pas le dire haut et fort, sinon elle risque de perdre son autorité morale.

Elle s'est confiée à ma collègue Katia Gagnon qui l'a suivie pas à pas pendant les neuf derniers jours de la campagne électorale. Vous pourrez lire son reportage samedi.

«Dans le contexte actuel, j'ai une responsabilité, lui a-t-elle dit. Je vais assurer la transition.»

Elle restera à la tête de Vision Montréal, le temps d'épauler son équipe, mais après, bye-bye ! Pas question de revivre le cauchemar des dernières semaines. «Je ne referai pas ça !» a-t-elle tranché.

Pendant que Katia Gagnon suivait Louise Harel, ma collègue Louise Leduc, elle, collait aux basques de Richard Bergeron, le chef de Projet Montréal. Elles nous racontent les rebondissements d'une campagne réalisée avec les moyens du bord, la course folle des derniers jours : Louise Harel qui fait le tour de la ville dans une petite Yaris bleue qui lui sert de bureau, Richard Bergeron qui galope d'un point de presse à l'autre à pied.

Gérald Tremblay ? Il a refusé de relever le défi. Il boude les journalistes. Il n'est pas content, le maire, de voir La Presse, Le Devoir, la Gazette et Radio-Canada déballer des scandales. Les relations entre le maire et les journalistes sont, comment dirais-je, réfrigérantes.

Lundi, lorsque Gérald Tremblay a donné son point de presse, la scène était surréaliste : les mêmes journalistes, la même salle, les mêmes questions, la même atmosphère crispée. Comme si l'immense parenthèse des élections, où le pouvoir a failli échapper au maire, n'avait pas existé.

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À Longueuil, le notaire Jacques Goyette a été battu par Caroline St-Hilaire. Pourtant, son parti régnait sur la Ville depuis 27 ans. Mais ses liens étroits avec certains promoteurs ont soulevé des questions d'éthique.

M. Goyette a nié qu'il y avait un problème. La population en a jugé autrement. Dimanche, les Longueuillois l'ont mis à la porte de l'hôtel de ville.

Longueuil a été secoué par un scandale et vlan ! Le candidat Goyette se retrouve à la rue.

Pendant ce temps, à Montréal...

Et si je déménageais à Longueuil ?