Le premier ministre Jean Charest se demande ce qu'il advient du fédéralisme d'ouverture promis par son homologue fédéral. La chef de l'opposition, Pauline Marois, a décrété pour sa part «la fin du fédéralisme d'ouverture» après les attaques de Stephen Harper contre le Bloc québécois.

Ces propos de nos chefs politiques, combinés au rejet des conservateurs par l'électorat du Québec lors des dernières élections fédérales, montrent que pour la plupart des Québécois, le fédéralisme d'ouverture n'a de valeur que s'il se joue à sens unique. Le gouvernement canadien doit être ouvert aux exigences du gouvernement du Québec; mais ce dernier ne doit jamais se montrer satisfait, ne doit jamais cesser de dénoncer Ottawa et de revendiquer plus d'argent et plus de pouvoir. Autrement dit, à l'ouverture fédérale le Québec répond par la fermeture la plus totale.

 

On l'a vu encore cette semaine lorsque M. Charest s'en est pris à la décision du fédéral de limiter la croissance des paiements de péréquation. Depuis quelques jours, on entend dire que cette décision privera le Québec de 1 milliard. On évoque les compressions imposées aux provinces dans les années 90. Des affirmations de ce genre ne servent pas les intérêts du Québec parce qu'elles sont dénuées de tout fondement et, par conséquent, minent notre crédibilité vis-à-vis du reste du pays.

Tous ceux qui ont suivi les discussions sur la réforme de la péréquation savent que le gouvernement du Québec en est sorti le grand gagnant. De 2006-2007 à 2009-2010, même en tenant compte de la décision de M. Flaherty, les paiements de péréquation versés au Québec auront augmenté de presque 3 milliards, un bond de 50%. Il était évident qu'en raison de l'enrichissement de l'Alberta, ces dernières années, la nouvelle formule mise en place serait insoutenable pour les finances fédérales. Le choix du ministre des Finances ne «prive» pas le Québec de 1 milliard; les paiements de péréquation continueront de croître, mais à un rythme raisonnable. La colère de M. Charest est celle d'un enfant gâté.

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Quelles qu'aient été les motivations partisanes de Stephen Harper, le fait est qu'il a rétabli l'équilibre fiscal au Canada, au grand avantage du Québec, et qu'il a pris un risque politique important en déposant aux Communes une motion reconnaissant le Québec comme nation. Comment M. Charest a-t-il exprimé sa gratitude? En faisant tout pour nuire aux conservateurs au cours de la dernière campagne fédérale. De plus, il a osé s'attribuer, comme la mouche du coche, le mérite de la reconnaissance de la nation.

En cela, le premier ministre s'est montré le digne représentant de l'électorat québécois, qui a envoyé paître M. Harper lors du scrutin de l'automne. Les Québécois s'inquiètent du sort du fédéralisme d'ouverture? Ils ont raison. Les conservateurs, comme les autres politiciens du pays, ont très bien compris le message: sous Jean Charest autant que sous un premier ministre indépendantiste, le gouvernement du Québec réclamera toujours plus d'«ouverture», en particulier celle du coffre-fort fédéral. Mais le fédéralisme, c'est-à-dire l'ouverture mutuelle, ne l'intéresse absolument pas.