Le politicien idéal aurait le courage de ses convictions. La vie politique, la quête du pouvoir, les aléas de la conjoncture lui imposeraient certes des virages et des compromis. Mais il y a un seuil qu'il refuserait de franchir: celui des idées qui lui sont les plus chères, celui de ses principes. Pour ceux-là, il serait prêt à se battre, quitte à perdre. À quoi bon faire de la politique si ce n'est pour défendre des idées?

C'est pourquoi il était si révoltant de voir, l'automne dernier, des partis fédéralistes pactiser avec le Bloc québécois. Rien à voir avec la légitimité - incontestable - des députés bloquistes. Simplement, il était à nos yeux à la fois inacceptable et incompréhensible que des politiciens croyant au Canada agissent de manière à renforcer une formation vouée à la sécession du Québec.

 

De la même manière, on ne peut qu'être scandalisé en apprenant que l'Action démocratique a proposé au Parti québécois de former une coalition afin de soutirer le pouvoir à Jean Charest avant qu'il ne déclenche des élections, en novembre dernier. Comment Mario Dumont a-t-il pu envisager de gouverner aux côtés d'un des «vieux partis» qu'il n'avait cessé de dénoncer depuis la création de l'ADQ? Pire encore, de gouverner avec un parti dont plusieurs des positions étaient à des années-lumière des siennes? C'est pourtant ainsi que les choses se sont passées, comme l'a révélé la semaine dernière le chef du bureau de La Presse à l'Assemblée nationale, Denis Lessard.

Pour mémoire, voici ce que M. Dumont écrivait dans son livre (publié en 2005) au sujet de l'offre que lui avait fait Lucien Bouchard de se joindre à son gouvernement: «En réalité, tout m'éloignait du PQ: le cheminement politique qui avait été le mien jusqu'alors, mon aversion pour le dogmatisme étroit de ce parti, l'obligation dans laquelle étaient ses chefs et ses grands ténors de faire, périodiquement, profession de foi pour la souveraineté, sans parler de l'obligation de s'engager, de façon récurrente, vis-à-vis de ce que les péquistes appellent pompeusement la social-démocratie (...).» On apprend aujourd'hui que tout éloignait M. Dumont du Parti québécois... sauf l'appétit du pouvoir. Il avait pourtant intitulé son livre Avoir le courage de ses convictions.

C'est vrai, l'ADQ était confrontée à l'époque à la perspective d'une raclée électorale. Vrai aussi, la coalition aurait reposé sur un accord tentant de faire le pont entre les deux programmes. Tout de même, pour un parti qui a toujours prétendu offrir une rupture avec la politique du passé, la manoeuvre était rien de moins que grossière.

Ne vaut-il pas mieux perdre en étant fidèle à ses idées que prendre le pouvoir sous de fausses représentations? C'est, en tout cas, ce que croirait le politicien idéal.