La démission de Denis Coderre du poste de lieutenant de Michael Ignatieff au Québec met la touche finale au gâchis qu'a provoqué le choix du candidat libéral dans Outremont. Alors que l'aile québécoise du PLC avait fait un bon bout de chemin dans sa reconstruction, alors que les sondages plaçaient les libéraux à portée du Bloc québécois, cette affaire a fait surgir des rancoeurs et des divisions telles celles qui ont tant nui à la formation dans le passé.

Les versions des faits étant contradictoires, il n'est pas facile de départager les torts. On ne se trompe sans doute pas en concluant qu'ils sont partagés.

 

Martin Cauchon et Denis Coderre auraient dû se rencontrer il y a déjà quelques mois pour faire le point sur les intentions du premier. M. Cauchon a préféré contourner M. Coderre tandis que ce dernier n'a rien fait pour tirer les choses au clair.

Une fois que la crise a éclaté, M. Cauchon aurait dû accepter de se présenter dans Jeanne-Le Ber, comme le lui offrait son chef. Il avait autant de chances de l'emporter là que dans Outremont et cette avenue aurait permis à tout le monde de sauver la face.

Le chef ayant pris sa décision, M. Coderre aurait dû s'y plier.

Chose certaine, en annonçant sa démission, M. Coderre n'aurait pas dû s'en prendre à «la garde rapprochée de Toronto». Cette déclaration, dont Gilles Duceppe s'est régalé, suivra les libéraux pendant la campagne électorale.

Certains estiment que Michael Ignatieff a mal géré toute cette histoire. Cette conclusion nous apparaît excessive. Si le chef s'est retrouvé avec une «patate chaude» entre les mains, c'est que ses subalternes et M. Cauchon n'ont pas eu la volonté de trouver un compromis honorable.

Chose certaine, c'est M. Ignatieff qui doit maintenant réparer les pots cassés. Il a choisi de ne pas remplacer M. Coderre au poste de lieutenant pour le Québec. Il est vrai que les candidats à ce poste ne sont pas nombreux. Néanmoins, le chef libéral fait preuve de témérité en laissant l'aile québécoise ainsi décapitée. Notamment, il accroît le risque que les décisions concernant le parti au Québec soient prises... par la «garde rapprochée de Toronto». L'expérience catastrophique des conservateurs en 2008 confirme que la campagne québécoise d'un parti fédéral ne doit pas être dirigée par le «national».

Le Parti libéral du Canada a aujourd'hui une chance de se réimplanter au Québec. Il serait dommage, pour le parti comme pour le pays, que l'ambition, l'orgueil et l'entêtement de certains de ses leaders lui fassent rater cette chance.