L'année était à peine commencée que le bureau de Stephen Harper a publié un communiqué intitulé : «2010 : Une année internationale pour le Canada.» «Le regard du monde sera tourné vers le Canada, y affirme le premier ministre. Nous entendons profiter des sommets du G8 et du G20 (qui auront lieu en Ontario en juin) pour poursuivre notre rôle de leader dans les dossiers importants pour les Canadiens et les Canadiennes.»

Rôle de leader? Quel rôle de leader?

Le pays hôte de ces sommets jouit, pour quelques heures, d'une influence plus grande que celle conférée par sa puissance économique et militaire. Ainsi, en 2002, Jean Chrétien avait profité du sommet de Kananaskis pour amener les leaders des pays riches à s'engager en faveur d'un Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique.

Pour sa part, le premier ministre Harper a multiplié les gaffes et les erreurs d'appréciation sur la scène internationale. De son appui prématuré à Israël dans la guerre du Liban à son impardonnable indifférence à l'égard de Chine, des séances de photos manquées au G20 de Londres et au G8 de L'Aquila à son invisibilité à Copenhague, M. Harper a montré qu'il ne comprend pas les sensibilités des Canadiens en ce qui a trait au rôle de ce pays dans le monde.

Lorsque ses politiques sont impopulaires mais justifiables, comme dans la lutte aux changements climatiques, le premier ministre n'a pas su en faire la pédagogie. De plus, le gouvernement conservateur n'a pas su saisir les occasions qui se présentent parfois à une puissance moyenne pour jouer un rôle déterminant dans un dossier particulier. Brian Mulroney l'a fait en s'investissant dans la lutte contre l'apartheid, Lloyd Axworthy l'a fait en étant le catalyseur de la négociation de la Convention sur l'interdiction des mines antipersonnel.

Enfin, M. Harper n'a pas compris l'importance de l'aspect symbolique dans les affaires internationales. Le premier ministre trouve que s'adresser à l'Assemblée générale des Nations unies est une perte de temps parce que ces discours se déroulent généralement devant un parterre aux trois quarts vides. Pourtant, si tant de leaders se prêtent à l'exercice, c'est qu'ils le savent utile, qu'il s'agit d'une occasion idéale pour montrer à ses concitoyens qu'on agit, que le sort de la planète nous préoccupe.

Les Canadiens sont fiers de la tradition pearsonienne du pays. Ils veulent que cette tradition se poursuive, que le Canada continue de jouer, dans la mesure de ses moyens et même un peu plus, un rôle de défenseur de la démocratie, des droits de la personne et de la paix dans le monde. Ils ne veulent surtout pas d'un chef de gouvernement absent, indifférent ou incompétent. Ils tiennent à ce que leur premier ministre soit un leader pour vrai, pas seulement dans les communiqués de presse.