Les dirigeants des 27 pays membres de l'Union européenne sont réunis aujourd'hui à Bruxelles pour convenir de mesures qui empêcheront les ennuis financiers de la Grèce de se répercuter sur tout le continent. Le risque est réel. Il met en évidence la principale faiblesse de la monnaie commune depuis sa création il y a 11 ans, l'absence de mécanismes garantissant que les pays dont l'euro est la devise s'imposent une stricte discipline budgétaire.

En principe, les pays membres de la zone euro doivent respecter certaines règles. Par exemple, leur déficit budgétaire annuel ne doit pas dépasser 3% du PIB et leur dette ne doit pas peser plus lourd que 60% du PIB. En réalité, plusieurs pays ont impunément ignoré ces plafonds dans le passé.

 

Cette fois-ci, la situation est plus grave. Fragilisés par la récession, les États dont les finances étaient déjà en mauvais état se retrouvent à quelques pas du précipice. C'est surtout le cas de la Grèce, qui a fait peu d'efforts au cours des dernières années pour assainir ses finances. En 2009, le déficit du gouvernement grec a atteint 12,7% du PIB. La dette publique frôle les 113% du PIB. Si on ne lui lance pas une bouée de sauvetage, Athènes sera incapable d'assumer ses obligations auprès des prêteurs. Les banques détentrices de titres grecs subiront des pertes importantes, les craintes concernant d'autres maillons faibles de l'UE (Irlande, Portugal, Espagne, Italie) seront exacerbées. Plus inquiétant encore, la crédibilité de l'euro, deuxième devise du monde, sera minée.

C'est pourquoi il est devenu évident, au cours des derniers jours, que les pays membres trouveront un moyen de voler à la rescousse du gouvernement du premier ministre George Papandreou. Les décisions qui seront annoncées à l'issue de la rencontre de Bruxelles ne régleront toutefois pas le problème de fond de la zone euro. Comme l'explique The Economist, «la crise grecque confirme qu'il était insensé de réunir autour d'une même devise des pays très différents sans prévoir un mécanisme, telle une autorité fiscale centrale, qui serait en mesure de confronter les déséquilibres internes de l'union».

Pour cette raison, plusieurs économistes réclament l'instauration en Europe d'un «fédéralisme budgétaire». Si la crise actuelle forçait une telle évolution, elle n'aurait pas été vaine. Toutefois, c'est une voie que n'emprunteront pas les chefs de gouvernement, jaloux qu'ils sont de la souveraineté de leurs pays respectifs.

Il reste que, s'ils veulent préserver l'euro, les dirigeants européens devront sans doute se résoudre un jour à une plus forte intégration budgétaire. À ce sujet, l'économiste allemand Dieter Wermuth exprime le principe que les Québécois ont souvent entendu de la bouche de l'ancien premier ministre, feu Robert Bourassa: «Une union monétaire ne peut pas se passer d'une politique financière commune, ou plus précisément d'une union politique.»

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