Expliquant pourquoi ses députés n'allaient pas défaire le gouvernement Harper lors du vote sur le budget, Michael Ignatieff a déclaré: «Les Canadiens ne veulent pas d'élections. Ce qu'ils souhaitent, c'est une solution de rechange et c'est ce que nous leur donnerons.» Le chef libéral a raison, les Canadiens ne veulent pas d'élections et bon nombre d'entre eux attendent que s'offre une solution de rechange au gouvernement conservateur. Malheureusement, le Parti libéral n'a pas encore démontré qu'il était en mesure d'offrir cette alternative.

On en trouve une nouvelle preuve dans les commentaires de M. Ignatieff sur le budget déposé jeudi dernier. Ses propos ne donnent aux Canadiens aucune indication précise sur ce que ferait un gouvernement libéral pour rétablir l'équilibre budgétaire. Dans sa réplique au budget, le chef libéral a dénoncé «l'inexistence d'un plan cohérent pour reprendre le contrôle des dépenses publiques». Il est vrai que le plan du ministre des Finances, Jim Flaherty, comporte beaucoup de zones d'ombre. Mais quel est le plan libéral? Dans son discours, M. Ignatieff ne propose pas de compressions de dépenses, outre quelques mesures symboliques. Au contraire, les libéraux suggèrent de nouvelles dépenses, notamment des «investissements historiques dans l'énergie propre» et diverses mesures pour stimuler la création d'emplois.

 

Avec raison, le chef de l'opposition officielle souligne que les hausses prévues des cotisations de l'assurance emploi (35% sur quatre ans) constituent bel et bien une augmentation du fardeau fiscal, contrairement aux prétentions du gouvernement. Cependant, si ces cotisations ne sont pas augmentées, Ottawa devra trouver 8 milliards de plus pour équilibrer son budget en 2014-2015; où un gouvernement libéral dénicherait-il cette somme?

Bien sûr, le rôle principal des partis de l'opposition est de critiquer le gouvernement. De plus, d'un point de vue stratégique, un parti aspirant à gouverner doit éviter de mettre de l'avant des propositions trop détaillées, sinon il offrira une cible facile au gouvernement en place. Cela dit, il faudra bien que le Parti libéral donne aux Canadiens une idée de la manière dont il abordera les problèmes auxquels le gouvernement fédéral est confronté. Il n'est pas responsable d'affirmer qu'il faut dépenser plus ici et là sans expliquer comment on y arrivera sans creuser davantage le fossé budgétaire.

«Ce budget échoue les tests de la crédibilité, de la vision et de l'ambition», estime M. Ignatieff. On sait que le chef libéral a une vision ambitieuse pour l'avenir du Canada, une vision que nous partageons. Au chapitre de la crédibilité toutefois, la preuve reste à faire.