Quel que soit le parti qui remportera les élections le 8 décembre, les Québécois auront bientôt droit à des traitements de fécondation in vitro (FIV) payés par l'État. C'est en tout cas la promesse des trois principaux partis. Avant de s'engager dans cette voie, il faudra cependant prévoir des balises strictes pour éviter les dérapages et le gaspillage de fonds publics.

Jean Charest s'engage à payer les deux premières tentatives d'implantation d'embryon. Ses adversaires, eux, n'ont pas précisé leur offre. Quelle que soit son étendue, la couverture gouvernementale sera perçue comme une caution morale. Il est donc essentiel que Québec ne rembourse pas des opérations discutables du point de vue éthique ou médical. Les libéraux promettent de déposer un projet de loi dès la prochaine session pour encadrer les traitements. Une étape incontournable, peu importe le parti qui prendra le pouvoir. Il faudra cependant s'assurer de ne pas passer à côté des enjeux importants.

 

Le gouvernement devra se prononcer sur la quantité d'embryons à implanter, au moins pour les traitements qu'il rembourse. Augmenter leur nombre accroît les chances de succès, mais également les possibilités de grossesses multiples qui, elles, présentent toutes sortes de risques pour la santé de la mère et des foetus. Même si des femmes sont prêtes à courir ce risque, l'État ne doit pas encourager cette pratique. La Belgique en a d'ailleurs fait une condition de remboursement. Lors des deux premiers traitements, les femmes de moins de 36 ans ne peuvent recevoir qu'un embryon et celles de 36 à 39 ans sont limitées à deux. En cas d'échec, les cliniques peuvent en rajouter un de plus aux traitements subséquents.

Il sera aussi nécessaire de tracer la ligne. Les femmes peuvent vouloir recourir à la FIV pour toutes sortes de raisons. L'État, pour sa part, doit s'en tenir au traitement de l'infertilité. La France, qui couvre jusqu'à quatre cycles de FIV, a fait le choix des couples hétérosexuels, ensemble depuis au moins deux ans, dont l'infertilité a été médicalement diagnostiquée. La femme doit avoir moins de 43 ans. Imposer des critères est essentiel, car on parle ici de fonds publics. Il ne faut pas confondre l'infertilité avec la baisse naturelle de fertilité (qui vient avec l'âge) ou avec l'impossibilité biologique de se reproduire ensemble (dans le cas de conjoints de même sexe). Nous avons souvent défendu les droits des homosexuels et la liberté de choix dans ces pages. Il est cependant important de se rappeler que le régime public d'assurance-maladie n'a pas été conçu pour rembourser tous les actes médicalement praticables, mais pour traiter les problèmes de santé.

Finalement, il sera important de suivre les familles qui ont recours à la FIV. Les mères présentent-elles plus de grossesses multiples et de complications? Les enfants ont-ils davantage de problèmes de santé? Le premier bébé-éprouvette québécois n'a pas 30 ans et les techniques de reproduction assistée sont plus populaires que jamais. Il faut se donner les moyens d'en mesurer les impacts.

akrol@lapresse.ca

 

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