Cinq cent vingt-quatre pages, 10,3 mégaoctets: le premier rapport annuel du Commissaire à la santé et au bien-être est une sacrée brique. Un document assez pesant pour forcer le changement? On peut en douter. D'autres avant lui ont posé des diagnostics semblables, mais le traitement traîne en longueur.

Le rapport, malgré son poids physique et numérique, est passé presque inaperçu lors de sa publication cette semaine. Pas de chance pour Robert Salois, qui effectuait sa première grande sortie depuis sa nomination, il y a près de trois ans: Monique Jérôme-Forget a choisi la même journée pour démissionner!

 

La brique aurait-elle eu plus d'écho si elle était tombée dans un désert de nouvelles? Difficile à dire. On y trouve des constats très justes, à commencer par l'importance d'améliorer la fameuse première ligne (accès aux médecins de famille et à des soins en tout temps ailleurs qu'aux urgences, etc.). «Les systèmes de santé qui ont une première ligne forte atteignent de meilleurs résultats et à moindre coûts», rappelle le commissaire.

Ses recommandations? Favoriser l'inscription des patients auprès de groupes de professionnels de la santé couvant plusieurs disciplines, informatiser les dossiers des patients, entre autres. Rien de bien nouveau, mais comment pourrait-on le lui reprocher? Si le titulaire de ce poste créé par le gouvernement Charest va dans le même sens que d'autres experts qui se sont penchés sur la question avant lui, ce n'est pas par manque d'originalité. C'est surtout parce que ce système, dont on ne finit plus de diagnostiquer les problèmes, tarde à effectuer les changements qui lui sont prescrits.

Le ministre de la Santé fait une lecture plus optimiste du rapport. Il y voit la confirmation que son gouvernement a fait les bons choix, notamment en misant sur les groupes de médecine familiale (GMF) et la création de dossiers santé informatisés. Les politiciens, on le sait, ont tendance à voir leur verre à moitié plein et les médias, à faire remarquer qu'il est à moitié vide. La seule mesure qui compte vraiment, c'est l'expérience concrète des patients. Ceux qui ont la chance de se faire soigner rapidement pourraient dire, eux aussi, que le verre est à moitié plein. Mais comme il n'y a pas assez d'eau pour tout le monde dans ce verre-là, bien des malades attendent encore trop longtemps avant d'être servis.

Le ministre Bolduc a raison, le système de santé fait des pas dans la bonne direction. Sauf qu'il avance avec une lenteur telle qu'on ne voit pas le jour où il arrivera au but.

Peut-être y a-t-il un déblocage à espérer de la dernière suggestion du commissaire Salois, qui propose de revoir le mode de rémunération des médecins. Ce serait, selon lui, un véritable levier pour toutes les autres recommandations. Car le paiement à l'acte, dans sa forme actuelle, ne tient pas compte de plusieurs activités essentielles aux soins de première ligne, dont le suivi des patients. Le ministre de la Santé promet d'ouvrir la discussion, mais encore là, c'est un travail de longue haleine.

Pourquoi ne pas en faire une priorité? Notre système de santé a reçu plus de diagnostics que nécessaire. Il est temps de passer aux traitements, et vigoureusement.

 

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