On savait que les Canadiens consomment trop de sel. On a maintenant la preuve que ce n'est pas leur faute. Les multinationales de l'alimentation ont tendance à offrir des versions plus salées de leurs produits ici, révèle une étude internationale. C'est vrai pour les rondelles d'oignon de Burger King, mais aussi pour des aliments considérés comme bons pour la santé, comme les céréales All Bran. Qu'attend Ottawa pour intervenir?

Le sel est un tueur insidieux. Nous en avons besoin d'un minimum pour vivre mais, au-delà d'une certaine dose, il devient une menace pour la santé. Et cette limite est facile à dépasser. Un adulte canadien en consomme presque 3100 mg par jour en moyenne. C'est 35% au-dessus du seuil considéré comme sans danger - ce que les spécialistes appellent l'apport maximum tolérable. Et plus du double de la quantité nécessaire pour répondre aux besoins normaux. Rappelons que l'excès de sel favorise l'hypertension, qui augmente à son tour les risques des maladies cardiaques et rénales, ainsi que le risque d'accident vasculaire cérébral (AVC).

 

À moins d'être extrêmement attentif à cet ingrédient, vous en mangez sûrement plus que vous ne le pensez. En effet, la plus grande partie du sodium que vous consommez ne provient pas de la salière que vous agitez au-dessus de votre assiette, mais des aliments vendus dans les restaurants et les épiceries. Si on veut réduire l'incidence des maladies liées au sel, on ne peut pas se fier uniquement aux efforts individuels. Il faut réduire l'apport à la source.

L'enquête publiée par le World Action on Salt and Health la semaine dernière est éloquente. L'organisme britannique a comparé des produits que des multinationales vendent dans plusieurs pays. La version canadienne est souvent la plus salée, ou l'une des plus salées, que l'on trouve dans le monde. Le cas le plus frappant est celui des All Bran, qui contiennent 2,15 grammes de sel par 100g - trois fois plus qu'aux États-Unis.

Le problème est bien connu des autorités de santé publique. Le ministre fédéral Tony Clement a créé un groupe de travail sur le sujet en 2007. Deux ans plus tard, on attend encore des résultats.

Ottawa doit en faire une priorité. C'est ce que le Royaume-Uni a fait il y a quelques années, et ça commence à rapporter. L'agence gouvernementale responsable des normes en matière d'alimentation veut réduire la consommation de façon significative d'ici à 2012. Et même si ses cibles sont volontaires et qu'il reste encore plus de deux ans pour les atteindre, plusieurs fabricants les ont déjà adoptées.

Les normes volontaires donnent souvent de résultats étonnants. On l'a vu chez nous avec les gras trans, qui ont disparu de bien des listes d'ingrédients. On en trouve encore, en particulier dans la restauration rapide et dans les aliments à bas prix. Mais beaucoup de fabricants ont compris d'eux-mêmes qu'ils avaient intérêt à faire mieux.

Le sel est le prochain ingrédient controversé pour lequel l'industrie devra rendre des comptes. Et elle en est bien consciente. Plusieurs entreprises se demandent déjà comment modifier leurs recettes. Mais si on veut qu'elles s'y mettent, et en grand nombre, il va falloir qu'Ottawa prenne l'initiative.

akrol@lapresse.ca

 

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