Enfin un peu de justice! Les infâmes libérations au sixième de la peine pourraient bientôt devenir chose du passé au fédéral, grâce au projet de loi déposé récemment par le gouvernement Harper. Attention toutefois à la pensée magique. Garder les criminels derrière les barreaux va accroître la pression sur les pénitenciers. Avant de chambouler le système, assurons-nous qu'il puisse répondre à la demande.

Les victimes et la population s'en plaignent, même la ministre québécoise de la Justice a fait pression sur Ottawa. Il est inacceptable qu'un fraudeur d'envergure comme Vincent Lacroix, qui a ruiné des milliers d'épargnants, sorte de prison après avoir purgé seulement le sixième de sa peine. Le sixième! Comment peut-on effacer ainsi plus de 80% de la sanction déterminée par un juge? Ça n'a aucun sens.

 

D'autant que le coupable n'a pas grand effort à faire pour mériter cette clémence. Si son crime n'est pas considéré comme violent, qu'il séjourne pour la première fois dans un pénitencier, qu'il n'a pas fait de vagues et qu'on ne s'attend pas à ce qu'il commette des infractions violentes, il est automatiquement admissible à la fameuse procédure d'examen expéditif. Il sera remis en semi-liberté dans une maison de transition. On aurait voulu favoriser les bandits à cravate qu'on n'aurait pas trouvé mieux.

Les escrocs de haut vol ne sont pas portés sur la violence et savent quoi faire pour avoir l'air de prisonniers modèles. Mais c'est une erreur de les laisser sortir sur ces seuls critères. Le système pénal ne sert pas qu'à réhabiliter des délinquants. Il doit aussi nous donner le sentiment qu'un minimum de justice a été rendue. Et pour ça, il faut que le coupable paie pour ses crimes.

Une peine de prison, c'est aussi une reconnaissance publique du tort causé. Permettre à des criminels de n'en subir que le sixième, c'est faire insulte aux victimes et aux tribunaux.

L'abolition de la procédure d'examen expéditif touchera également les voleurs et les trafiquants de drogue. Qui s'en plaindra? Si le projet de loi est adopté, tout ce beau monde devra purger au moins le tiers de sa peine avant de demander sa remise en liberté. Le tiers! On est loin du goulag!

Cela dit, il ne faut pas être naïf. Le système actuel contribue grandement à réduire la population carcérale et les budgets qui lui sont dévolus. Le ministre fédéral de la Sécurité publique assure que les pénitenciers ont l'espace pour garder leur clientèle plus longtemps. Et qu'il n'en coûtera pas plus de 60 millions par an. C'est un peu court.

Le gouvernement Harper ne peut pas se prétendre pour la loi et l'ordre et fermer les yeux sur les désordres qu'il risque de causer dans les prisons. Il doit fournir une estimation détaillée de l'impact de sa réforme, et dire comment il aidera le système correctionnel à y faire face.

 

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