Le gouvernement Charest l'a répété à satiété. Si les hôpitaux universitaires montréalais sont construits en partenariat public-privé, ce n'est pas à cause d'un préjugé favorable. Non non. C'est parce que les études montrent que ça coûte moins cher. Sauf que plusieurs des analyses ayant mené à cette conclusion étaient erronées, nous apprend le vérificateur général. Qu'attend-on pour refaire les calculs?

Selon l'Agence des partenariats public-privé, bâtir le CHUM et son centre de recherche en mode PPP coûtera 24% moins cher qu'en mode conventionnel. Pour le Centre universitaire de santé McGill (CUSM), l'économie dépassera 17%. L'ennui, c'est que ces savantes projections n'ont jamais été rendues publiques. On n'a donc jamais pu avoir l'opinion de spécialistes externes. Il fallait croire Québec et son agence sur parole. Le vérificateur général est le premier expert indépendant à mettre son nez dans cette montagne de chiffres. Et ce qu'il y a trouvé est assez consternant.

Par exemple, on a supposé qu'un hôpital en PPP serait parfaitement entretenu, alors qu'en mode conventionnel, l'État le laisserait se délabrer durant 30 ans, jusqu'à ce qu'ils coûtent une fortune à retaper. La province n'a jamais été trop zélée dans l'entretien de ses infrastructures, c'est vrai. Mais les hypothèses retenues pour les calculs sont délirantes. Après 30 ans, le CHUM et le CUSM seraient dégradés à 94%. Tout juste bons à raser et à reconstruire. Dans secteur de la santé où, redisons-le, on n'a jamais fait de zèle, le pire bâtiment recensé affiche un indice de vétusté de 37%. Dans plus de la moitié des édifices, ça ne dépasse pas 20%. Si cet indice, et les frais qui en découlent, n'avaient pas été gonflés, la différence entre les deux modes aurait fondu de moitié.

D'autres facteurs ont faussé les calculs. Ils sont assez techniques, mais valent la peine d'être soulignés. La formule PPP a été mise en concurrence avec une seule autre, la plus traditionnelle. Il existe pourtant d'autres modes conventionnels, comme le clé-en-main, qui auraient pu mieux soutenir la comparaison. Le taux utilisé pour refléter les coûts en dollars d'aujourd'hui était inutilement élevé... alors que plus ce taux est élevé, plus le mode PPP paraît avantageux! Finalement, plusieurs éléments qualitatifs importants, qui sont défavorables au mode PPP, n'ont pas été considérés.

Le verdict aurait-il été différent si les analyses avaient été mieux faites? La formule PPP aurait-elle permis des économies suffisantes pour compenser son incroyable lourdeur? Ou, pire, se serait-elle révélée plus coûteuse? Le vérificateur n'a pas examiné cette question. Nous croyons qu'il est urgent de le faire. Les professionnels de la santé des deux grands hôpitaux universitaires, qui devront composer durant plus de 30 ans avec le carcan d'un PPP, ont le droit de savoir. Les Québécois qui auront à payer cette note de plus de 5,2 milliards de dollars aussi.

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