La fin de 2008 aura été témoin de transformations marquantes dans l'univers de la presse écrite. Aux États-Unis, deux quotidiens importants, le Chicago Tribune et le Los Angeles Times, se sont placés sous la protection de la loi sur les faillites. À Detroit, deux quotidiens dont le Detroit Free Press ont annoncé qu'ils ne livreraient plus leur journal papier que trois jours par semaine. Le très respecté Christian Science Monitor, quant à lui, n'imprimera plus qu'une seule édition hebdomadaire et poursuivra son excellent travail dans internet. Enfin, à Toronto, le Globe and Mail vient d'annoncer la disparition de son cahier livres. Le quotidien continuera à publier quelques critiques dans son édition du samedi, mais les lecteurs sont surtout invités à se déplacer vers internet pour trouver l'information littéraire recherchée.

Il n'y a plus de doute possible, la révolution tant annoncée est bel et bien amorcée.

Et comme pour marquer le coup, le prix Pulitzer vient d'annoncer que les publications en ligne pourront désormais soumettre des reportages dans les 14 catégories de ce prestigieux concours.

La presse écrite telle qu'on la connaît aujourd'hui ne sera bientôt qu'un souvenir nostalgique.

C'était d'ailleurs la teneur des propos d'un professeur de journalisme américain venu s'adresser aux membres de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec, il y a quelques semaines. Philippe Meyer a répété ce qu'il avait d'abord écrit dans un essai fort remarqué publié en 2004. À l'époque, The Vanishing Newspaper avait des accents apocalyptiques. Aujourd'hui, force est de constater que l'auteur avait vu juste.

Internet, et son corollaire (la gratuité de l'information), est en train de transformer en profondeur le monde de la presse écrite. Les aspirants à la profession qui travaillent fort dans les facultés de journalisme, rêvant de remplacer Pierre Foglia un jour, feront leur entrée dans un univers professionnel qui ne ressemble en rien à celui d'il y a 10 ou même cinq ans.

De plus en plus, on demande aux journalistes non plus de répondre simplement aux cinq W, mais bien de décliner l'information sous plusieurs formes. Le mot-clé: multiplateforme. Désormais, les journalistes bloguent, parlent devant la web caméra, narrent et animent en plus d'interagir avec les lecteurs.

Dans ce nouveau contexte, le lecteur-citoyen joue, lui aussi, un rôle différent. Il est beaucoup moins passif. Il propose des nouvelles, des sujets, des photos et, de plus en plus, ses opinions. De quelle façon les journalistes feront-ils valoir leur expertise dans ce contexte de démocratisation de l'information? Cela reste à voir... et à inventer.

La bonne nouvelle dans tout cela (du moins du point de vue des artisans de l'information) est que, malgré les multiples transformations technologiques, le désir de s'informer, de comprendre et d'approfondir le monde qui nous entoure demeure. Il faut s'en réjouir.

Comme l'a déjà remarqué avec justesse Mary Trammel, rédactrice en chef de la société qui publie le Christian Science Monitor, «la méthode de livraison et le format sont secondaires. Il suffit de les ajuster pour que le journal soit toujours de son temps».

Ou si vous préférez : le journal est mort, vive le journal!