Le contraste était frappant, hier, entre l'attitude triomphante de Régis Labeaume, à Québec, et la mine un peu défaite de Gérald Tremblay, à Montréal.

Alors que le maire de la capitale, l'allure très décontractée, prenait le temps de répondre à toutes les questions des journalistes au lendemain de son élection, le maire Tremblay, raide comme une barre, n'a répondu qu'à quatre questions en français lors d'un point de presse on ne peut plus expéditif.

 

Contrairement à son collègue de Québec, le maire Tremblay n'a aucune raison de pavoiser. Sa victoire est mince. Non seulement a-t-il remporté moins de 40% des voix, mais en outre, il se retrouve aux commandes d'une équipe amputée de quelques-uns de ses meilleurs morceaux. André Lavallée, infatigable responsable des transports, était la voix de sa conscience en matière de transports collectifs. Il n'était pas le seul. Michel Labrecque, conseiller dans l'arrondissement de Plateau-Mont-Royal et président de la STM, avait une vision claire et résolument avant-gardiste de la Ville de demain. Leur défaite crée un trou béant dans l'équipe du maire Tremblay.

D'autant plus que parmi les nouvelles recrues d'Union Montréal, Robert «porteur de ballon culturel» Pilon et Diane «c'est mon homme» Lemieux n'ont pas réussi à se faire élire. Or le maire comptait sur eux pour incarner le renouveau. Un autre coup dur, donc, même si M. Tremblay ne l'avouera pas sous la torture.

À la question «Seriez-vous ouvert à l'idée de nommer des candidats des autres formations au comité exécutif?» le maire a répondu qu'il avait une très bonne équipe... Est-ce à dire qu'il ne tirera aucune leçon des résultats de dimanche et qu'il continuera à exercer le pouvoir comme auparavant? Il est trop tôt pour en présumer. Il devrait cependant y penser deux fois avant de fermer complètement la porte à une éventuelle coalition. C'est le genre de geste audacieux qui lui ferait regagner de la crédibilité aux yeux des Montréalais.

Pour l'instant, c'est en annonçant plusieurs mesures (dont la suspension temporaire des investissements de la Ville) que le maire a décidé de regagner la confiance des électeurs. Avec l'aide de Québec, le maire Tremblay semble aujourd'hui déterminé à nous faire oublier une éventuelle commission d'enquête publique, une idée qu'il avait pourtant appuyée durant la campagne.

Autant du côté du ministre des Affaires municipales, Laurent Lessard, que du maire de Montréal, on nous propose plutôt une série d'actions sensées rétablir l'ordre dans le monde municipal québécois (révision du processus d'appels d'offres, resserrement des règles d'éthique, changements dans les méthodes d'attribution de contrats, etc.). On dit vouloir mettre fin aux rumeurs de corruption et de collusion. Mais en voulant traiter le problème à la pièce, on ne s'attaque pas au fond de la question, c'est-à-dire à l'existence d'une machine bien huilée. Les Montréalais ne sont pas dupes. Ils attendent davantage.