À mesure que les heures passent, il est clair que le gouvernement haïtien et son président, René Préval, sont trop heurtés par la tragédie pour être en mesure de prendre les commandes des opérations à Haïti.

Les images qui nous sont parvenues au cours des derniers jours nous montrent un président à l'allure fragile. Le choc qu'a subi cet homme semble l'empêcher, pour l'instant, d'assumer pleinement ses fonctions de dirigeant. Lui aussi fait partie des victimes.

 

Non seulement son palais a été détruit, mais son gouvernement est atteint en son coeur: plusieurs ministres ont perdu la vie dans le séisme.

Or, si Haïti a besoin d'aide humanitaire, de vivres et de médicaments, le pays a également besoin d'un leader, d'une voix rassurante, un peu comme celle du maire de New York, Rudolph Giuliani, au lendemain des attaques terroristes du 11 septembre 2001.

Cette voix viendra-t-elle de la communauté internationale? L'idée du président français, Nicolas Sarkozy, de tenir une conférence internationale est intéressante, mais il faudrait que cela se fasse dans les plus brefs délais, avant que la situation ne s'envenime.

On nous rapporte des vols et des pillages. Des hommes armés sillonneraient les rues et terroriseraient une partie de la population. Hier, des policiers auraient tué un homme identifié comme étant un pilleur. Or, qui dit que cet homme ne voulait pas tout simplement nourrir sa famille? C'est pour éviter ce genre de confusion qu'il faut rétablir un minimum de loi et d'ordre dans les rues de Port-au-Prince. Les victimes du séisme, aujourd'hui sans-abri, ne doivent pas se sentir abandonnées une seconde fois. L'absence d'un leader fort est en partie responsable de cette désorganisation.

Aujourd'hui, le conseil de sécurité de l'ONU doit se réunir à New York. Hier, le ministre des Affaires étrangères canadiennes, Lawrence Cannon, a annoncé la tenue d'une conférence sur la reconstruction qui aura lieu à Montréal le 25 janvier prochain, et à laquelle le premier ministre d'Haïti, Jean-Max Bellerive participera. On n'en attendait pas moins de la part du gouvernement Harper. Il doit en effet s'imposer sur le plan politique et s'assurer que le Canada soit intimement lié à toutes les opérations de reconstruction à Haïti. Nos liens avec ce pays le justifient.

Bien sûr, les Haïtiens doivent absolument participer à toutes les opérations de coordination, de planification et de reconstruction. Comme l'observait l'économiste Narcisse Fièvre, ancien doyen de la faculté des sciences économiques de l'Université Quisqueya, dans nos pages samedi, «il faut une commission mixte qui permette au gouvernement haïtien de faire valoir son point de vue. Il faut que le gouvernement reprenne sa place».

En anglais, on nomme empowerment l'action de se prendre en charge, d'assumer sa destinée sur tous les plans. Le gouvernement canadien et la communauté internationale ont donc le devoir d'aider Haïti à se (re)prendre en mains, à se reconstruire sur des bases plus solides, afin que le gouvernement haïtien soit en mesure, à plus long terme, d'assumer le leadership qui lui revient.