Les propos du président Sarkozy contre la division, le sectarisme et l'enfermement sur soi font la manchette des journaux depuis une semaine. Ils ont choqué plusieurs personnes, y compris évidemment la plupart des souverainistes. Certains ont souligné que de toute évidence, M. Sarkozy ne comprend pas le Québec. Ils ne semblent pas s'être demandés s'il comprend la France. Ils auraient dû le faire.

Héritier du parti issu de celui fondé par le général de Gaulle, M. Sarkozy n'a pas hésité à mettre au rancart la vision de ce dernier. En ce faisant, il a dit tout haut ce que plusieurs de ses prédécesseurs pensaient tout bas: la souveraineté du Québec n'a pas d'avantages pour la France.

 

Depuis des années, la France développe des liens extrêmement étroits avec le Québec et cela dans tous les domaines: culturels, commerciaux, politiques, économiques, scientifiques, touristiques, académiques, etc. S'ils le désirent, la France et le Québec ont toute la latitude voulue pour renforcer ces liens, à preuve les discussions qui doivent mener à la reconnaissance réciproque des diplômes.

Sur le plan international, le Québec a sa voix à l'UNESCO et fait partie de la francophonie. Aux Nations-Unies, à l'OTAN et ailleurs, la France et le Canada partagent souvent les mêmes vues. Si le Québec en faisait partie à part entière, sa voix serait la plupart du temps identique à celle du Canada. Bref, la France n'y gagnerait rien.

Avec la construction de l'Union européenne, les pays membres, y compris la France, font disparaître les barrières, tentent de mettre fin à leurs divisions, rejettent le sectarisme, découragent l'enfermement sur soi.

C'est dans cette atmosphère que le président oeuvre chaque jour, qu'il développe son programme, qu'il nourrit ses pensées. C'est dans ce contexte qu'il a tenu ses propos.

Avec l'élan qui fait sa marque, il a dit en ses mots ce que plusieurs présidents et premiers ministres français ont souligné aux autorités souverainistes québécoises: le fédéralisme canadien sert d'exemple à l'Europe; les pouvoirs des provinces sont à plusieurs égards plus importants que ceux des états membres de l'Union européenne; ils aiment le Québec, mais ils respectent beaucoup le Canada. Par gentillesse, ils ont évité de leur souligner que leurs demandes incessantes, parfois sectaires, les exaspéraient, telle celle d'annuler une rencontre du premier ministre de France avec celui de l'Ontario à Toronto, parce qu'elle risquait de jeter un nuage sur la primauté de la rencontre avec le premier ministre du Québec.

Finie donc l'expression non-ingérence, non-indifférence. Elle alimentait les querelles, elle ne correspondait plus à la nouvelle donne. En disant qu'il veut avoir des relations amicales avec le Canada et fraternelles avec le Québec, le président Sarkozy parle au nom de la France tout entière.

L'auteur est un ancien ambassadeur du Canada en France.