Je réalise que certains vont sursauter en lisant le titre de cet article. À de nombreuses reprises, au cours des dernières années, on m'a apostrophé en disant: «Vous et vos idées à la George W. Bush! Vous ne voyez pas le résultat que ça donne?» Pourtant, en quittant dans quelques jours la présidence des États-Unis, George W. Bush laisse un héritage socialiste et étatiste et non un héritage de liberté et de diminution du rôle de l'État.

Pour s'en convaincre, il suffit de regarder les chiffres officiels. Je tiens à souligner que toutes les données citées dans cet article sont accessibles sur le site web du gouvernement américain et que j'utilise des dollars constants, c'est-à-dire qui tiennent compte de l'inflation. Autrement dit, quand je parle d'augmentation de dépenses gouvernementales dans tel ou tel secteur, il s'agit de vraie augmentation. (...)

Entre 2001 et 2008, les dépenses du gouvernement fédéral américain ont grimpé de... 30%. Est-ce bien là du «néolibéralisme»?

Mais quand j'évoque pareilles données, mes interlocuteurs répliquent invariablement que ce phénomène est strictement lié à la croissance des dépenses militaires.

Certes, entre 2001 et 2008, les dépenses militaires (maintenant 21% des dépenses totales) ont doublé. Mais les dépenses non militaires ont quand même augmenté de 23% sous le gouvernement Bush (toujours en dollars constants)!

D'où provient cette augmentation de 766 milliards de dollars dans les dépenses non militaires? Les chiffres révèlent une autre surprise à ceux qui n'ont pas suivi l'évolution de l'État américain: les deux tiers de l'augmentation ont servi à payer des hausses de dépenses sociales. Sous Bush, les dépenses de Medicare (l'assurance maladie publique pour les gens âgés) ont augmenté de 166 milliards; les dépenses de Social Security (les retraites publiques), de 159 milliards; les dépenses en santé autres que Medicare, de 88 milliards; les dépenses de sécurité du revenu, de 76 milliards; et les dépenses d'éducation et de services sociaux, de 23 milliards, et ainsi de suite. Encore une fois, les données sont implacables: George W. Bush a suivi à la lettre le guide du parfait petit politicien socialiste et étatiste.

Fardeau réglementaire

Et ce n'est pas tout. Les dépenses publiques ne représentent qu'un aspect de la croissance de l'État fédéral américain sous George Bush. Le fardeau réglementaire a également bondi, comme l'indique l'évolution des budgets des organismes fédéraux de réglementation tels que compilés par le Mercatus Center et le Weidenbaum Center, deux think tanks américains.

Sous l'administration de George W. Bush, les budgets des organismes de réglementation sociale ont augmenté de 66% et ceux des organismes de réglementation économique de 42%, pour une augmentation totale de 62%. La réglementation économique vise les transactions économiques et financières: finance, banques et autres industries. La réglementation sociale s'attache à la protection des consommateurs et des travailleurs. Il est vrai que la définition de cette dernière comprend la Homeland Security, qui prend maintenant la part du lion. Mais même si on exclut la croissance des dépenses de sécurité intérieure, les budgets de réglementation sociale ont crû de quelque 10% sous Bush. (...)

Les données que j'ai citées n'incluent pas les mesures et dépenses interventionnistes du gouvernement Bush devant la crise financière apparue l'automne dernier. Elles n'incorporent ni les nouveaux contrôles financiers ni les centaines de milliards de dollars consacrés aux sauvetages d'entreprises financières et industrielles. Avec la nationalisation de plusieurs grandes sociétés cet automne et l'acquisition de participations dans les fabricants américains d'automobiles, George W. Bush aura été le président qui aura nationalisé les plus grands pans de l'économie américaine. (...)

L'auteur est président du Conseil du patronat du Québec.