Ces jours-ci, encore à cause d'un étranger (Barack Obama), le Québec se remet à rêver de son axe économique nord-sud. Cet axe qui, pourtant, a toujours fait l'envie des autres provinces et même d'autres pays du monde comme la France, mais que trop souvent, les Québécois eux-mêmes oublient.

Il aura fallu qu'un président d'un autre pays avance par ricochet, en parlant de cette nouvelle économie liée par le train plutôt que par l'automobile, que notre intégrité territoriale passe par l'intégration encore plus forte de nos deux pays.

 

Pourtant, cette idée a déjà été présentée et soutenue par des milliers de Québécois engagés dans le commerce entre les États-Unis et le Canada depuis des lunes: la nature du commerce international québécois est d'abord nord-sud et non est-ouest. Ce n'est pas la sacro-sainte France qui va assurer l'avenir économique du Québec.

Le Québec va prospérer le jour où il va prendre la décision de se concentrer sur le grand triangle Montréal-Boston-Washington-Chicago. Le Québec va prospérer lorsqu'il va se concentrer sur son commerce nord-sud, d'abord vers les États-Unis, puis vers l'Amérique du Sud.

Le train à grande vitesse doit partir de Montréal et relier New York en priorité. Il doit aussi y avoir un embranchement à Albany qui reliera Boston en passant par Springfield au Massachusetts. On pourrait même revoir le lien proposé à l'époque entre Montréal et Burlington-Manchester-Boston.

Le train Québec-Windsor n'aura jamais l'attrait d'un lien nord-sud pour Montréal, la démographie et la richesse collective allant de soi. Québec et Ottawa ne doivent pas prioriser cet axe. Il serait suicidaire au plan économique et même touristique de penser qu'il y aurait un avantage à réaliser ce projet.

La Nouvelle-Angleterre, c'est 15 millions de personnes à deux pas de chez nous et New York métropolitain c'est 20 millions de personnes. Dois-je vraiment vous sortir les chiffres de l'Ontario? D'ailleurs pourquoi le lien naturel nord-sud existe-t-il entre Vancouver-Seattle et Portland, mais que nous, ici, nous devrions prioriser l'axe est-ouest?

N'allez surtout pas croire que je suis un séparatiste convaincu qui veut briser le Canada, loin de là. Toronto et Windsor pourront bien créer leurs liens eux aussi s'ils le souhaitent avec le sud. Non, en fait, je vois même le Québec comme leader canadien du commerce avec les États-Unis. Et j'en rajoute même en imaginant le Québec comme principale porte d'entrée des Européens en mal d'Amérique qu'ils soient commerçants ou touristes.

Faut-il vraiment que la bonne idée vienne de l'extérieur pour que nos gouvernements l'envisagent?

En Nouvelle-Angleterre, le grand projet Boston-New York-Washington se réalise. Les études ont été faites et les gouvernements des États concernés finissent présentement de s'entendre sur les tracés et les ajustements techniques d'utilisation des rails. Il reste à ajuster le cas de la ligne de train de banlieue Métro North à New York qui se rend jusqu'à New Haven au Connecticut et qui commanderait des transformations majeures si le train à haute vitesse voyait le jour dans son entité complète.

Il manque cependant à l'Amérique du Nord ce concept d'intégration territoriale que les Européens ont réussi à créer de manière habile. Nous n'aurons pas le choix d'arriver un jour ou l'autre à un vrai traité de libre-échange, ce qui n'est pas le cas de l'ALENA en ce moment.

Il se pose aussi l'éternelle question de la douane entre les deux pays dans l'optique ou un train relierait Montréal à New York et à Boston si l'intégration territoriale ne peut se faire. Pourtant, une partie de la solution vient de la carte NEXUS que plusieurs grands voyageurs se procurent et qui permet de passer la douane sans même rencontrer un douanier, et ce, des deux côtés de la frontière.

Le premier ministre d'un pays ou d'une province qui osera aller si loin sera celui qui permettra l'intégration territoriale canado-américaine, la solution ultime à la sécurité économique de nos deux pays liés inévitablement et à tout jamais par une histoire commune et intégrée. C'est aussi ça, le commerce de proximité.

Pierre Harvey

L'auteur est président et conseiller en commerce international de Harvey International inc. à Sherbrooke.