J'ai 28 ans, résidante du Québec. Je suis la maman d'un extraordinaire petit garçon de 2 ans. Il est en pleine santé, tout comme mon conjoint et moi. Il y a cinq mois, j'ai rendu visite au Dr Tiller.

Nous avions planifié un petit frère ou une petite soeur à notre fils. Un de nos rêves était de bâtir une belle petite famille de quatre où les deux enfants seraient relativement rapprochés en âge.

 

Absolument aucune inquiétude n'était à envisager: il n'y a pas histoire médicale sérieuse dans notre entourage familial. Cependant, du jour au le demain, nous sommes tombés dans une spirale étourdissante, entourés d'une vigoureuse équipe de conseillers en génétique que nous rencontrions un peu trop souvent pour discuter de tests de toutes sortes, d'arbre généalogique, de gênes, de XX, de XY, de malformations, de séquelles neurologiques, de chance de survie.

À 25 semaines de gestation, ces spécialistes nous ont offert plusieurs solutions. Toutefois, la solution que nous avons privilégiée unanimement, mon conjoint et moi, se trouvait ailleurs, un peu plus loin. Nous sommes une famille jeune, mon conjoint a 26 ans. Nous avons la vie devant nous. Nous avons des aspirations professionnelles, des projets de vie et de voyages plein la tête. Nous gérons deux belles carrières. Nous ne souhaitions pas que notre vie «s'arrête» maintenant.

Ça paraît difficile à croire et c'est triste à dire, mais de par les malformations physiques présentes dans le foetus, cet enfant n'aurait pas ressemblé à un être humain «normal» et le pronostic neurologique était très pessimiste. Je sais trop bien qu'aucune garderie n'aurait accepté cet enfant et que cela ne signifie pas seulement un congé de maternité d'un an, mais un arrêt de travail de l'un de nous deux. Bref, d'énormes sacrifices.

J'affirme ouvertement que je ne suis pas «faite» pour être «aidante naturelle». Cet être aurait souffert énormément, car plusieurs chirurgies étaient déjà planifiées au moment de sa naissance.

Paradoxalement, cet horrible cauchemar m'a fait rencontrer Dr Tiller, un grand homme qui a transformé cet événement en expérience extraordinaire sur le plan humain. Une expérience qui m'a fait grandir. Il nous a fait entrer doucement, mon conjoint et moi, dans un monde de respect, de fraternité, de calme, d'amour. Tout comme lui, je continuerai de vivre ces valeurs. Mes profondes discussions et les précieux moments passés avec lui ne mourront jamais. Je suis honorée d'avoir eu la chance de connaître personnellement le Dr Tiller. Le souvenir de s'être serrés très fort dans nos bras à mon départ. Cette rencontre a changé ma vie profondément.

Aujourd'hui et pour toujours, il n'y aura pas un moment ou je me lèverai le matin en ne pensant pas à lui. Il a sacrifié sa vie pour empêcher le malheur dans ma famille ainsi que pour les milliers d'autres familles qu'il a sauvées depuis près de 35 ans. En son honneur, je vivrai le reste de ma vie heureuse, car il s'est dévoué à mort pour cela. Je ne peux plus me permettre d'être malheureuse.

L'auteure, qui habite la région de Gatineau, s'est fait avorter par le Dr George Tiller. À sa demande, nous avons accepté exceptionnellement de préserver son anonymat.