Après les «conditions gagnantes» et «l'étapisme», voici maintenant que le Parti québécois nous annonce une nouvelle stratégie pour que la pilule passe mieux: l'indépendance par petites doses ou «la souveraineté homéopathique».

Cette nouvelle stratégie est en fait le constat d'échec de l'incapacité de remporter un référendum sur la souveraineté dans un avenir rapproché. Le plan B, basé sur l'insatisfaction perpétuelle, consiste donc à se lancer dans une série de demandes continuelles de nouveaux pouvoirs. Et à chaque fois que l'on en obtiendra un, on en demandera immédiatement un autre. En cas de refus, ce ne sera pas grave puisqu'on mise sur un sentiment de rejet pour déclencher une crise constitutionnelle, ce qui ne pourra avoir qu'un effet bénéfique sur la cote de la souveraineté.

Une des premières compétences visées sera la culture. Cette dernière est devenue un enjeu sensible depuis les compressions effectuées dans certains programmes par le gouvernement Harper, et qui ont été au coeur des dernières élections fédérales.

Mais il est important de se rappeler qu'il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain. Ce n'est pas parce que l'actuel gouvernement conservateur malmène la culture qu'il faut automatiquement conclure que le fédéral n'a pas sa place dans ce champ de compétence et qu'il nuit à la culture québécoise. Ce raccourci ne résiste ni à l'analyse ni aux faits.

Au contraire, la compétence partagée a toujours bien servi la culture québécoise. Le Conseil des Arts, Téléfilm, le Fond canadien du cinéma et de la télévision, la SRC et l'ONF, pour ne citer que les principaux, ont été des intervenants essentiels dans l'élaboration et la diffusion de notre culture. Il convient de rappeler que le Québec, représentant 23% de la population canadienne, reçoit une part du budget de Patrimoine Canada largement supérieure à ce chiffre.

Pourquoi? Parce que depuis longtemps le gouvernement fédéral et le reste du Canada ont compris que les deux langues et les deux cultures qui se côtoient sont un exemple unique au monde et sont au coeur même de l'essence et de la richesse de ce pays.

Puisqu'on nous promet un référendum sectoriel en cas d'échec des négociations, la question posée devrait alors s'articuler comme suit: «Seriez-vous d'accord pour que les artistes et les industries culturels perdent d'importantes sommes d'argent pour que la culture devienne compétence exclusive du Québec?»

Bien sûr, certaines économies d'échelle pourraient être réalisées mais les pertes seraient plus considérables que les gains. La pilule serait difficile à avaler.

Qu'arriverait-il si le Québec était aux prises avec de sérieux problèmes financiers qui l'obligeraient à diminuer son soutien à la culture de façon conjoncturelle? Le milieu et les industries n'auraient plus le filet de sécurité que constitue la compétence partagée.

Et puis rien ne garantit que tout serait plus «rose» sous une compétence exclusive du Québec. Le dossier du doublage en est un exemple flagrant. Cette industrie traverse une énième crise parce que les gouvernements qui se sont succédés à Québec ont toujours manqué de courage politique pour régler cette question, avec comme résultat qu'actuellement seulement 5% des DVD distribués au Québec sont doublés ici.

La levée de boucliers provoquée par la situation actuelle à la SRC nous montre que fédéralistes et souverainistes peuvent travailler ensemble pour défendre une institution qui a joué un rôle prépondérant dans l'édification et la diffusion de la culture québécoise.

Ainsi, il est évident que le milieu et les industries culturels ont beaucoup à gagner dans le dialogue et la collaboration entre nos ordres de gouvernement et n'ont surtout pas besoin d'être pris en otages par des jeux politiques et de faire les frais d'une nouvelle querelle fédérale-provinciale. Méfions-nous du chant des sirènes!

L'auteur est comédien. Aux élections fédérales de 2008, il a été candidat du Parti libéral dans Outremont.