L'émouvant reportage d'Agnès Gruda, publié aujourd'hui dans ce cahier, ouvre une nouvelle fenêtre sur les conditions de vie pénibles des 10 000 Inuits habitant au Nunavik, dans le Nord du Québec. Malheureusement, les reportages et les appels au secours ont beau se multiplier, la population reste indifférente. Par conséquent, les gouvernements bougent, mais trop peu, trop lentement.

L'émouvant reportage d'Agnès Gruda, publié aujourd'hui dans ce cahier, ouvre une nouvelle fenêtre sur les conditions de vie pénibles des 10 000 Inuits habitant au Nunavik, dans le Nord du Québec. Malheureusement, les reportages et les appels au secours ont beau se multiplier, la population reste indifférente. Par conséquent, les gouvernements bougent, mais trop peu, trop lentement.

Les problèmes qui minent la société inuite du Nunavik - abus d'alcool et de drogues, violence familiale, suicides - sont d'une grande complexité. Il n'y aura pas de solution facile ou rapide. Toutefois, une chose est sûre: tant qu'on n'aura pas comblé la pénurie de logements, aucun autre problème ne pourra être résolu.

Les logements du Grand Nord québécois sont surpeuplés depuis des décennies. Québec et Ottawa financent la construction d'habitations, mais la population croît beaucoup plus vite que le nombre de logements. Par conséquent, la situation se détériore au lieu de s'améliorer. De 1996 à 2006, la proportion d'habitants du Nunavik vivant dans des logements surpeuplés a même augmenté, passant de 47% à 49%. «Le surpeuplement conjugué à la violence, à la toxicomanie et à d'autres formes d'abus affecte directement la sécurité ou le développement des enfants», concluait la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse il y a trois ans. «Tous les problèmes sociaux sont aggravés. Lorsqu'il y a abus d'alcool, de drogue, lorsqu'il y a de la violence, les gens ne savent plus où aller», disait le maire de Kuujjuaq, Paul Parsons, à notre collègue Marie Tison (La Presse, 13 septembre 2010).

Depuis la publication du rapport de la Commission, Québec a investi des sommes substantielles pour améliorer les services offerts à la population inuite. La rénovation du Centre Sapummivik, où Agnès a côtoyé des jeunes en difficulté, témoigne de cet effort. Il y a six mois, le fédéral et le provincial ont conclu une entente de 190 millions de dollars en vertu de laquelle 350 nouvelles habitations seront construites dans les 14 villages du Nunavik. Québec s'est aussi engagé à bâtir et à financer l'entretien pendant 20 ans de 50 logements supplémentaires. Ça ne sera pas suffisant.

La Société Makivik, responsable du développement socio-économique de la région, estime qu'il manque 1000 logements. La Société et le gouvernement québécois planchent depuis quelques mois sur un plan de rattrapage qui permettrait de combler ce déficit d'ici sept ans. Cependant, le gouvernement fédéral tarde à s'engager dans le projet. Les Inuits sont à bout de patience, au point où ils songent à poursuivre Ottawa. Car, au Nunavik, chaque jour qui passe amène son lot de tragédies humaines.