Des dizaines de milliers de personnes ont envahi les plaines d'Abraham pour manifester leur appui à la construction d'un nouveau Colisée et au retour des Nordiques. Il est paradoxal que le projet d'un amphithéâtre financé par des fonds publics recueille un tel appui dans la région de Québec, terreau fertile pour l'ADQ et le Parti conservateur, deux partis prônant une réduction de la taille de l'État. Les gens de Québec seraient donc de droite pour la santé, l'éducation, l'économie... mais de gauche lorsque vient le temps de séduire la LNH.

Des dizaines de milliers de personnes ont envahi les plaines d'Abraham pour manifester leur appui à la construction d'un nouveau Colisée et au retour des Nordiques. Il est paradoxal que le projet d'un amphithéâtre financé par des fonds publics recueille un tel appui dans la région de Québec, terreau fertile pour l'ADQ et le Parti conservateur, deux partis prônant une réduction de la taille de l'État. Les gens de Québec seraient donc de droite pour la santé, l'éducation, l'économie... mais de gauche lorsque vient le temps de séduire la LNH.

L'opinion publique québécoise n'en est pas à une incohérence près. Le patron de Quebecor, Pierre-Karl Péladeau, a participé à la «marche bleue». M. Péladeau a entrouvert la porte à une contribution de son conglomérat à la construction du nouveau colisée. Ce serait la moindre des choses. Les médias de Quebecor dénoncent jour après jour le gaspillage qui plonge «le Québec dans le rouge». Cela étant, comment M. Péladeau pourrait-il exiger que les gouvernements assument la totalité des coûts d'un projet qui profitera surtout au secteur privé?

De son côté, le gouvernement Charest, qui s'engageait le printemps dernier à faire preuve de rigueur budgétaire, a trouvé en moins de temps qu'il n'en faut pour dire «le but d'Alain Côté était bon» la coquette somme de 175 millions pour le temple des Nordiques II. Rigueur budgétaire?

Les Québécois exigent des programmes sociaux généreux, programmes dont les coûts dépassent la capacité de payer du gouvernement provincial. Voici qui surgit une occasion inespérée: des milliards de pieds cubes de gaz de schiste. «La plupart des peuples seraient enchantés» par une telle découverte, notait The Economist. Pas les Québécois. Certes, la précipitation de l'industrie a suscité une inquiétude légitime. Cela ne justifie pas qu'on dise carrément «non au gaz de schiste». Si ce point de vue prévalait, le Québec se retrouverait dans une situation honteuse: après nous être privés des revenus du gaz, nous financerions nos programmes à même la péréquation générée par l'exploitation du pétrole albertain, exploitation que nous dénonçons par ailleurs. Plus hypocrite que ça...

Certains réclament la nationalisation de l'industrie gazière. Et pourquoi donc? Le fait qu'Hydro-Québec est une société d'État l'a-t-elle empêchée de se lancer dans des projets impopulaires, dont le Suroît? Lorsqu'Hydro a été chargée de rechercher du pétrole et du gaz (par le gouvernement Landry - les péquistes ne parlaient pas de moratoire à l'époque...), elle a fait chou blanc. Maintenant que des entreprises privées y sont arrivées, on les exproprierait?

Comme tous les peuples, les Québécois aiment mieux croire aux solutions miracles que faire les choix difficiles qui s'imposent. L'absence navrante de leadership politique dont nous sommes aujourd'hui témoins ne fait qu'encourager ce penchant pour la facilité.