Une seule phrase, prononcée sur les ondes d'une radio de Halifax, et le député conservateur Maxime Bernier s'est retrouvé une nouvelle fois dans l'embarras. M. Bernier devrait pourtant savoir que la question linguistique sera toujours explosive; il ne faut jamais l'aborder sans tourner sa langue sept fois.

Une seule phrase, prononcée sur les ondes d'une radio de Halifax, et le député conservateur Maxime Bernier s'est retrouvé une nouvelle fois dans l'embarras. M. Bernier devrait pourtant savoir que la question linguistique sera toujours explosive; il ne faut jamais l'aborder sans tourner sa langue sept fois.

L'ancien ministre est un libertaire. Son point de vue sur la langue d'enseignement découle de cette philosophie: «Oui, il est important que le Québec demeure une société majoritairement francophone. (...) Mais nous ne devrions pas chercher à atteindre cet objectif en restreignant les droits et la liberté de choix des individus.»

Nous partageons avec M. Bernier un grand souci pour le respect des libertés individuelles. Cependant, aucun droit n'est absolu. La Cour suprême du Canada a maintes fois reconnu que la préservation de la langue française est un «objectif important et légitime» justifiant l'intervention législative du gouvernement du Québec, pourvu que les restrictions aux droits des personnes ne soient pas excessives.

«Pourquoi les parents francophones ne pourraient-ils pas envoyer leurs enfants faire une partie de leurs études dans des écoles anglaises ou bilingues, de façon à ce qu'ils maîtrisent parfaitement les deux langues?» demande M. Bernier dans son blogue justificatif. Curieusement, le député n'y dit pas un mot du principal problème que la loi 101 a permis de régler, soit le fait que la grande majorité des enfants d'immigrants fréquentaient l'école anglaise. En 1976-77, 80% des jeunes allophones étudiaient au primaire ou au secondaire anglais. Dix ans plus tard, grâce à la loi parrainée par Camille Laurin, cette proportion était tombée à 36%; elle est aujourd'hui de 22%.

Depuis l'époque où le gouvernement Lévesque faisait adopter la Charte de la langue française, le Québec a beaucoup changé. Les francophones occupent aujourd'hui des postes de premier plan dans tous les secteurs, notamment à la tête de grandes entreprises. Néanmoins, la loi 101 reste nécessaire parce que l'anglais continue d'exercer une force d'attraction considérable. Cela ne signifie pas qu'il faille l'étendre aux cégeps et aux 27 000 petites entreprises de la province; de telles mesures auraient bien plus d'effets pervers que bénéfiques.

C'est aux Québécois francophones de prendre en main leur destinée linguistique au lieu de s'en remettre à l'État. Ils pourraient commencer par s'assurer que le français d'ici soit une langue de qualité, moderne et efficace. Le français bâclé et le franglais qui caractérisent beaucoup de spectacles, de publicités et de jargons minent la vitalité de notre culture bien plus que les quelques centaines d'allophones qui choisissent de fréquenter un cégep anglais. Ainsi, une pub comme celle du Parti libéral du Canada, avec pour slogan «Harper, pucapab», ne devrait pas amuser mais, plutôt, être vertement dénoncée.