À chaque campagne électorale depuis le fameux «livre rouge» de Jean Chrétien en 1993, le Parti libéral publie, en début de campagne, une plateforme électorale à la couverture rouge vif. Michael Ignatieff a poursuivi la tradition hier en dévoilant la septième incarnation du «livre rouge», un texte de 100 pages que le chef a décrit comme «un gros document sérieux».

Le programme libéral offre une vision cohérente des défis auxquels fait face le pays et des moyens qu'il faut prendre pour les relever. Les libéraux proposent une foule de mesures visant à aider les familles à joindre les deux bouts, à encourager les jeunes à étudier, à développer l'économie du pays tout en préservant l'environnement et à redorer le blason du Canada sur la scène internationale.

Les engagements les plus coûteux avaient déjà été annoncés: aide aux étudiants des collèges et des universités (980 millions par année), fonds pour les garderies (700 millions), soutien fiscal aux aidants naturels (610 millions). Contrairement aux conservateurs, les libéraux croient en un État interventionniste. Ce faisant, ils n'ont pas échappé à un vieux travers: pour chaque problème, ils prônent la mise en place d'un nouveau programme: stratégie canadienne sur la santé du cerveau, stratégie canadienne de promotion de la santé, stratégie canadienne sur l'eau douce, stratégie canadienne d'apprentissage, etc.

Au total, le programme libéral entraînerait des dépenses supplémentaires de 8,2 milliards en 2 ans. La formation prévoit financer ces dépenses en annulant les baisses d'impôt promises aux entreprises, une qui est entrée en vigueur au début de la présente année, l'autre annoncée pour 2012. M. Ignatieff aime répéter que cet allègement fiscal favorise «les grandes entreprises»; en réalité, les deux tiers des entreprises en profitent.

Le document comporte une étonnante zone d'ombre: les libéraux ne s'y engagent pas à un échéancier pour revenir à l'équilibre budgétaire. Ils promettent seulement de ramener le déficit du gouvernement à 1% du PIB dans 2 ans. Cette omission expose M. Ignatieff aux attaques de ses adversaires.

Au-delà des mesures spécifiques, il faut retenir la philosophie de gouvernement que prônent les libéraux. Alors que les conservateurs de Stephen Harper cherchent à polariser les débats à des fins partisanes, le PLC s'engage à «rassembler les Canadiens»; les libéraux en font même, avec raison, la principale responsabilité du premier ministre. En outre, plus clairement que dans le passé, le Parti libéral s'engage à «un respect rigoureux des compétences, des rôles et des responsabilités des provinces et des territoires».

Le programme libéral publié hier place les électeurs canadiens devant un choix clair entre deux conceptions du rôle de l'État fédéral. C'est sur cette base que la population devra choisir son prochain gouvernement le 2 mai.

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