Les ministres des Finances des pays membres de l'Union économique monétaire (UEM) européenne sont réunis au Luxembourg pour tenter de trouver une issue à la crise financière grecque. Il est acquis que la Grèce recevra une nouvelle tranche du prêt de 110 milliards d'euros (en dollars canadiens, 154 milliards) consenti l'an dernier. Cependant le problème de fond, c'est-à-dire la gestion d'une union monétaire sans politique budgétaire commune, reste entier. Et celui-là ne sera pas résolu de sitôt. L'éditorialiste du quotidien économique français Les Échos, Nicolas Barré, résume bien le dilemme auquel sont confrontés les leaders européens: «Il n'y a que deux sorties possibles (de la crise): par le bas dans un effondrement cataclysmique de la zone euro ou par le haut dans le fédéralisme.»

La plupart des analystes, et jusqu'au président de la Banque centrale européenne Jean-Claude Trichet, estiment que les Européens devront convenir d'une plus grande intégration de leurs politiques économiques. M. Trichet a parlé d'un «fédéralisme budgétaire» et d'un ministère européen des Finances. Il s'agirait d'éviter que la situation actuelle ne se reproduise, c'est-à-dire que des pays se placent dans une situation financière telle qu'ils menacent l'économie de toute l'Union.

Voilà qui est évident en théorie mais probablement impossible en pratique, du moins à court terme. Le mot «fédéralisme» fait peur en Europe, où les populations ne veulent pas céder davantage de leur souveraineté nationale à des institutions européennes perçues comme lointaines et bureaucratiques. Alors les dirigeants ont commencé, sans le crier sur les toits, à mettre en place des mesures limitant la marge de manoeuvre budgétaire des États membres. Ainsi, chaque pays membre doit désormais soumettre son plan budgétaire à la Commission européenne pour approbation.

À défaut d'une intégration plus forte, l'Europe se condamnera à revivre à répétition des crises comme celle qu'elle traverse péniblement aujourd'hui. Il est d'ores et déjà acquis que la Grèce n'aura pas assez de 110 milliards d'euros pour se sortir du bourbier. Toutefois, les dirigeants européens ne s'entendent pas sur ce qu'il faut faire ensuite. D'une part, les populations des pays riches de la zone euro, en particulier les Allemands, sont hostiles à l'idée de voir le produit de leurs taxes envoyé à des pays à leurs yeux mal gérés. D'autre part, toutes les solutions envisageables comportent des risques de contagion.

À court terme, d'une réunion à l'autre, les Européens bricoleront des mesures permettant d'éviter le pire. Mais pour que l'Union européenne redevienne la zone de prospérité qu'elle a été depuis sa création, il faudra davantage. La création de l'euro fut une mesure politique autant qu'économique. La survie de la monnaie commune passe par de nouveaux gestes politiques forts.

apratte@lapresse.ca