Annoncé le même jour que le budget du Québec, le nouveau système d'accueil des réfugiés est passé presque inaperçu chez nous. Il s'agit pourtant d'une réforme majeure, qui aura un impact déterminant sur le parcours des demandeurs d'asile.

La nouvelle structure proposée par le ministre fédéral de l'Immigration Jason Kenney réussira-t-elle à corriger les faiblesses du système actuel? Elle en a l'ambition, et les moyens. Le plan présenté mardi dernier est doté d'un budget de 540 millions sur cinq ans et créera plusieurs dizaines de postes à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, ainsi qu'à l'Agence des douanes.

Le régime actuel est affligé de trois problèmes chroniques. Le nombre de demandeurs en attente d'une audience, les délais avant d'être entendu et, en cas de refus, la lenteur des renvois. Ces trois problèmes en ont créé un quatrième: le Canada a la réputation d'être une planque où l'on peut s'incruster des années sans être délogé.

Le retard accumulé (60 000 dossiers!) ne s'effacera que progressivement, puisque ces demandes doivent être traitées dans le système existant. Par contre, toutes celles faites après la mise en place de la nouvelle structure auront droit à un traitement accéléré. Le ministre vise une audience en trois mois, six fois moins que le délai actuel. À ce rythme, on devrait pouvoir limiter la hauteur de la pile en attente. Quant aux demandeurs refusés, on vise un départ en 12 mois, donc quatre fois plus rapidement.

Le nouveau système entrera en vigueur l'an prochain au plus tôt. Et même s'il donne les résultats escomptés, il faudra du temps pour que le mot se passe. On peut cependant espérer qu'à terme, le Canada se fera reconnaître comme une juridiction où les demandes d'asile et les ordres de renvoi sont traités rondement. C'est le seul moyen de couper l'herbe sous le pied aux individus sans scrupule qui attirent des malheureux ici sous de fausses promesses.

Plusieurs éléments restent toutefois à clarifier. À commencer par cette controversée liste de tiers pays sûrs. Ce n'est pas un détail: les ressortissants de ces pays qui seront refusés n'auront pas droit à une révision devant la nouvelle section d'appel. Le ministre assure que la liste sera très courte et servira seulement à empêcher qu'un afflux de demandes non fondées, comme celles de la Hongrie l'an dernier, n'engorgent la machine. Il promet aussi qu'il pourra y avoir des exceptions pour des clientèles particulières, comme les femmes ou les homosexuels, qui ne seraient pas en sécurité dans ces pays jugés stables.

Il faudra également s'assurer que cette recherche d'efficacité ne devient pas contre-productive. Rassembler les preuves qu'on a été opprimé dans son pays d'origine exige parfois beaucoup de temps. Il ne faut pas tomber dans l'excès inverse et expulser des demandeurs légitimes sous prétexte que leur dossier n'était pas convaincant au moment de l'audience.

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