L'ombudsman des vétérans tire à boulets rouges sur la machine gouvernementale comme peu de ses homologues l'ont fait avant lui. Le gouvernement Harper ne doit pas rester sourd à ses critiques. Mais le principal intéressé doit aussi prendre garde de ne pas nuire à sa cause.

L'ombudsman des vétérans tire à boulets rouges sur la machine gouvernementale comme peu de ses homologues l'ont fait avant lui. Le gouvernement Harper ne doit pas rester sourd à ses critiques. Mais le principal intéressé doit aussi prendre garde de ne pas nuire à sa cause.

L'ombudsman-type critique le gouvernement une fois par année, dans un rapport présenté en conférence de presse. Ses remarques bien senties défraient la chronique durant quelques jours, une semaine tout au plus. Et on n'entend plus parler de lui jusqu'à l'année suivante, à moins qu'il ne consulte sur un enjeu précis dans l'intervalle.

Le colonel retraité Patrick Stogran s'y est pris autrement. Le ministre des Anciens combattants, Jean-Pierre Blackburn, a en main son plus récent rapport annuel, qu'il devrait rendre public peu après la reprise des travaux parlementaires, le 20 septembre. Mais l'ex-militaire n'allait pas en rester là.

Ceux qui fréquentent son blogue ont vu monter son exaspération à l'égard des «problèmes systémiques» du ministère. Et il a franchi un point de non-retour cette semaine, en convoquant une conférence de presse pour dénoncer une «bureaucratie délibérément obstructive et trompeuse» «qui prive depuis longtemps les anciens combattants et vétérans des programmes et services (...) qu'ils méritent».

Ayant appris que son mandat ne serait pas renouvelé, Pat Stogran a décidé de transformer ses trois derniers mois en croisade. Il invite le public, et même les fonctionnaires, à dénoncer le traitement fait aux anciens combattants.

M. Stogran, qui est le premier à occuper ce poste, est visiblement choqué de ce qu'il a entendu depuis trois ans. L'ampleur du problème est difficile à évaluer de l'extérieur. Mais quand d'ex-soldats racontent, les uns après les autres, avoir eu gain de cause en appel après que l'administration ait minimisé leurs troubles médicaux, il faut se poser des questions. Le fait que le ministère soit en train de se transformer pour répondre aux besoins des nouvelles générations n'excuse pas tout. Surtout s'il s'agit «d'une pratique profondément enracinée et de longue date», comme le prétend l'ombudsman.

Le ministre Blackburn travaille sur plusieurs dossiers, mais il ne semble pas alarmé par la dysfonction apparente de son administration. La vérificatrice générale devrait mettre son nez là-dedans. Si le Canada veut jouer dans la cour des grands, et envoyer ses soldats à la guerre plutôt qu'en mission de paix, il doit s'organiser en conséquence. Il aura beaucoup de militaires de retour de l'Afghanistan à s'occuper l'an prochain.

Quant à M. Stogran, il ferait bien de ménager sa crédibilité. Qu'il soit contrarié de voir un autre colonel retraité, l'avocat Michel Drapeau, le contredire publiquement, on peut comprendre. Mais répliquer sur Twitter que ce dernier «doit être en train de faire du lobby pour devenir le prochain ombudsman» est totalement déplacé. Si le colonel Stogran ne veut pas nuire à son combat, il devra choisir ses batailles... et éviter les règlements de compte personnel.

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