On nous l'a assez répété ces dernières années, le Québec a fait le choix du développement durable. Il a misé sur l'hydroélectricité, il a réduit ses gaz à effet de serre, il a verdi son économie.

On nous l'a assez répété ces dernières années, le Québec a fait le choix du développement durable. Il a misé sur l'hydroélectricité, il a réduit ses gaz à effet de serre, il a verdi son économie.

Puis les sirènes du pétrole se sont mises à chanter... Ensorcelant Pauline Marois, d'abord, revenue de Norvège persuadée que l'exploitation responsable du gisement Old Harry était possible. Et Jean Charest, ensuite, convaincu par les intentions de Terre-Neuve que le Québec devait lui aussi s'aventurer en mer.

Si bien que la province est aujourd'hui en mode rattrapage, avec tout ce que cela implique de précipitation.

Or s'il y a une chose, une seule, qu'il faut éviter dans un dossier aussi délicat, c'est bien l'empressement.

Le Québec a en main depuis hier une entente administrative avec Ottawa sur la «mise en valeur» des ressources du Golfe. Fort bien. Mais il ne s'agit là que du signal de départ d'une longue course à obstacles, non pas d'un sprint.

Il faudra d'abord franchir l'évaluation environnementale stratégique, dont les résultats ne sont attendus qu'à l'automne 2012. Suivra l'analyse gouvernementale, puis la consultation promise auprès des communautés touchées, autant d'étapes qui serviront à décider si oui ou non le Québec souhaite exploiter le golfe du Saint-Laurent.

Il faudra aussi créer ce fameux office Canada-Québec sur la gestion des hydrocarbures, un exercice plus complexe qu'il n'y paraît. Il existe certes un modèle dans la province voisine, mais l'actualité nous montre qu'il vaudrait mieux tailler dans le neuf. La marée noire dans le golfe du Mexique et le rapport du BAPE sur les gaz de schiste ont démontré, chacun à sa façon, l'importance de distinguer les mandats d'exploitation, de sécurité et de protection environnementale.

Il faudra enfin encadrer toute exploitation future de manière irréprochable, ce qui n'est pas gagné. Non seulement le milieu visé ne ressemble-t-il à aucun autre, que ce soit par son climat ou sa faible profondeur, mais en outre, on en sait bien peu sur ses populations. Pêches et Océans Canada parle même d'un «besoin criant» de connaissances sur les mammifères marins et autres espèces.

Ces différentes étapes cadrent mal avec la précipitation. D'autant que le litige frontalier avec Terre-Neuve est loin d'être réglé. Le Québec doit donc éviter de s'affoler, comme s'il avait une arme sur la tempe.

Il est vrai que Corridor Ressources, qui possède les droits sur l'ensemble du gisement, souhaite entamer rapidement l'exploitation du côté terre-neuvien. Mais la pétrolière pourrait peut-être se laisser convaincre d'y aller doucement, le temps que les différents éléments se mettent en place... et que son travail en soit ainsi facilité. Après tout, Corridor s'est dit prête à forer n'importe quand entre la mi-2012 et 2014.

Cela dit, peu importe la réponse de la pétrolière, rien ne justifie qu'on brûle une seule de ces étapes névralgiques. Aussi séduisant soit le chant des sirènes.

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