Si Barack Obama est déjà «psychologiquement sorti de l'Afghanistan», comme l'affirme le journaliste Bob Woodward, près de 150 000 militaires de son pays et des autres nations membres de l'OTAN, dont 2800 Canadiens, s'y trouvent toujours... physiquement. Et souvent pour leur plus grand malheur.

Si Barack Obama est déjà «psychologiquement sorti de l'Afghanistan», comme l'affirme le journaliste Bob Woodward, près de 150 000 militaires de son pays et des autres nations membres de l'OTAN, dont 2800 Canadiens, s'y trouvent toujours... physiquement. Et souvent pour leur plus grand malheur.

L'intervention canadienne en Afghanistan entre aujourd'hui même dans sa dixième année. Après tout ce temps, nos troupes doivent se retirer en juillet prochain, au moment où les militaires américains commenceront eux aussi, en principe, à regagner leurs foyers.

Dans quel état sera alors l'Afghanistan? Pendant combien de temps encore les troupes occidentales y demeureront-elles, fussent-elles beaucoup moins nombreuses et chargées de missions plus discrètes? Et surtout: aura-t-on porté un verdict définitif sur cette opération militaire vue en 2001 comme essentielle tout autant pour l'Ouest que pour les Afghans?

Sur ce dernier point, la réponse est oui: le verdict à porter sur l'Afghanistan semble devoir en être un d'échec. Et ce, alors que l'intervention maudite en Irak, celle-là même qui a littéralement tué le projet afghan, aura peut-être - à moins d'un gigantesque dérapage à venir - apporté quelque chose aux Irakiens et au monde.

Cruelle ironie...

«La guerre (afghane) pourrait être gagnée, mais pour cela, Washington devrait s'engager à fond pour des années à venir et, ça, les électeurs ne le supporteraient pas. L'Afghanistan est gagnable, mais pas vendable...», lit-on dans le plus récent ouvrage de Woodward, Les Guerres d'Obama (notre traduction).

L'Occident n'a plus beaucoup de patience, en effet.

En 2001, poussé à agir par le massacre de New York et Washington en même temps que saisi d'un idéalisme naïf, qu'a-t-on négligé de prendre en compte avant de se précipiter en Afghanistan?

D'abord, le moule historique, géographique et culturel qui fait des Afghans ce qu'ils sont.

«Nous, les Afghans, sommes très doués pour nous tuer les uns les autres», explique un colonel de l'armée afghane au journaliste Fabrice de Pierrebourg (qui le rapporte dans son récent ouvrage, Martyrs d'une guerre perdue d'avance). «À force de les côtoyer, j'ai compris qu'on ne les changera jamais», ajoute un soldat canadien de retour de mission. Cela s'incarne notamment dans une organisation sociale médiévale, rigide, corrompue, souvent injuste et cruelle, qu'on ne pénètre ni ne transforme, «démocratie» imposée ou pas.

Ensuite, on n'aura pas assez tenu compte de l'incoercible double jeu du Pakistan, la plus dangereuse contrée de la planète. En particulier de ses services secrets, qui n'ont jamais cessé de manipuler «leurs» talibans... avec lesquels, de fait, il faut aujourd'hui négocier.

Malgré cela, le Canada et ses militaires, en particulier, n'auront jamais à rougir de s'être engagés en Afghanistan. Le pari, celui d'une opération militaire lourde doublée d'un missionnariat démocratique et droits-de-l'hommiste, était moral.

Même s'il n'était pas gagnable.