L'État devrait-il mettre sur pied une Direction de la protection de la vieillesse (DPV) sur le modèle de l'organisme chargé de protéger les jeunes contre les abus? Le vieillissement de la population combiné à la vulnérabilité d'une proportion importante des aînés pourrait le faire croire...

Néanmoins, sans rire, un nouveau monstre bureaucratique est bien la dernière chose à imposer aux vieux.

Une partie des problèmes qu'ils vivent, en effet, résulte précisément de l'indifférence de la machine étatique à leur endroit. C'est-à-dire: à l'endroit d'une tranche de la population qui n'est ni à la mode, ni tonitruante, ni casseuse de vitrines... et qui n'est pas non plus le «futur avenir de demain» (sic), comme on le dit toujours comiquement au sujet des jeunes.

Aussi, on peut avoir l'impression que la plus belle initiative de l'État pour aider les aînés aura été de leur payer des clowns.

Pourtant, ce n'est pas de cette négligence-là qu'il était question lorsque la ministre responsable des aînés, Marguerite Blais, a annoncé des mesures contre la maltraitance: un nouveau site web, une ligne téléphonique d'urgence et une pub bâtie autour d'une figure charismatique, Yvon Deschamps. Ce n'est pas inutile, bien entendu: entre 4 et 10% des personnes âgées seraient victimes de maltraitance, de la simple négligence à la violence physique en passant par l'arnaque.

Cependant, un site, un téléphone et une pub, c'est en général ce que bricole un gouvernement lorsqu'il veut détourner l'attention d'un problème plus difficile, appelant des solutions coûteuses, complexes et hors de sa portée.

C'est précisément le cas avec les vieux.

Depuis 20 ans, la population québécoise des plus de 65 ans a doublé; dans 20 ans, elle aura encore doublé, de sorte que les aînés seront presque 2,5 millions et composeront le quart de la population. Leurs besoins en services à domicile, en résidences, en soins, en équipements et services adaptés... tout cela dépasse pour l'instant les capacités de l'État, en termes de finance, mais plus encore d'imagination, de créativité et de sens pratique.

Or, dans l'immédiat, ça n'intéresse personne. Pour paraphraser Deschamps: les vieux, qu'ossa donne? ...

En 2007-2008, la consultation publique sur les conditions de vie des aînés a été littéralement ensevelie sous les foulards, kirpans, érouvs et autres accessoires de la très médiatique commission Bouchard-Taylor. En 2009, il n'y a pas la moindre émeute à Montréal-Nord après qu'une immigrante de 67 ans y eut été assassinée de façon sordide en attendant l'autobus. On ne voit jamais de vieux clochards, qui sont pourtant les plus mal pris des mal pris, dans les pubs sociétales sur les sans-abri...

Psychologiquement, le Québec en est encore au stade du Tasse-toi mon onc'. Et tant que ça durera, il y a peu d'espoir que le sort des vieux s'améliore.