Nous publions aujourd'hui le deuxième de trois éditoriaux sur la droite au Québec.

Sensible aux problèmes du logement à Montréal, vous portez attention aux analyses de deux groupes de pression. Le FRAPRU, le Front d'action populaire en réaménagement urbain, qui prône une intervention massive de l'État. Et la CORPIQ, la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec, qui défend le marché.

Au fil des ans, vous avez pris connaissance de 1227 articles ou reportages de La Presse, du Devoir, de L'actualité, de TVA/Montréal et de Radio-Canada/Montréal. De ceux-là, 1090 exposaient les thèses du FRAPRU et 197 parlaient de la CORPIQ. Proportion: 84 contre 16%.

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Toute société développée baigne dans un univers virtuel consacré aux idées. Il est alimenté par des travailleurs - universitaires, journalistes, artistes, intervenants sociaux et autres professionnels des mots - formant une véritable classe sociale. Hors de celle-ci, point d'influence dans l'univers des idées. En clair: la parole de 10 000 plombiers n'y vaut pas celle d'un seul intervenant siégeant à une table de concertation de la tuyauterie!

Or, cette classe dominante penche très nettement à gauche. De sorte que son univers, comme celui d'Albert Einstein, s'en trouve tout courbé...

Revenons au FRAPRU. Ce n'est que l'un des 5085 groupes populaires accrédités par Québec. Tous sont animés par des travailleurs de terrain qui abattent une besogne formidable et par des professionnels des mots qui exercent un lobbying redoutablement efficace. Certainement aucun n'est-il malhonnête. Mais aucun n'est de droite. Ce discours «populaire» est donc rigoureusement unipolaire... ce que le peuple n'est pas.

Quant aux médias, on a déjà constaté dans le Trente, organe officiel de la profession, que «le biais progressiste de la classe médiatique (découle) d'une sensibilité idéologique hégémonique qu'on retrouve dans les couches supérieures de notre société» (Mathieu Bock-Côté, polémiste). Et que «les commentateurs qui filtrent les nouvelles politiques et les interprètent pour notre bénéfice, sauf exception, (baignent) tous dans le même bouillon» (Julie Miville-Deschênes, ombudsman de Radio-Canada).

C'est pareil pour les autres planètes de l'univers virtuel des idées.

À l'école québécoise, tous les enfants sont nourris d'une «éthique religieuse» coulée dans le moule du multiculturalisme, fétiche de la gauche pédagogue. Un artiste «engagé» est obligatoirement à gauche. Au haut du rayon «Essais québécois», trônent actuellement les ouvrages Contre Harper ainsi que Contes et comptes du prof Lauzon. Aux Hautes Études commerciales (pas à l'Académie Karl-Marx ni aux Sciences Po de l'UQAM, non. Aux HEC!), la star du corps professoral est un altermondialiste anticapitaliste conspirationniste du 11 septembre 2001...

Au total, si on veut rétablir un équilibre même approximatif dans l'univers virtuel des idées, il faudra tenir compte du fait que la gauche ne cédera pas son royaume et que tout le boulot incombera à la droite.

Or, par une sorte de malédiction historique, celle-ci a tendance à ne jamais être à la hauteur.

DEMAIN: La non-gauche