Faut-il s'inquiéter de la remontée, dont certains aspects sont étonnants, de la droite américaine? Ou bien les craintes exprimées à son sujet, y compris chez nous, ne font-elles que ravaler la façade du vieil antiaméricanisme courant depuis un demi-siècle? Prendre du recul en cette matière n'est pas aisé. Mais il se pourrait bien que cette droite, que nous appellerons palinienne ou beckienne en l'honneur de l'ex-candidate à la vice-présidence ou du commentateur de Fox News, présente des caractéristiques inusitées.

Faut-il s'inquiéter de la remontée, dont certains aspects sont étonnants, de la droite américaine? Ou bien les craintes exprimées à son sujet, y compris chez nous, ne font-elles que ravaler la façade du vieil antiaméricanisme courant depuis un demi-siècle? Prendre du recul en cette matière n'est pas aisé. Mais il se pourrait bien que cette droite, que nous appellerons palinienne ou beckienne en l'honneur de l'ex-candidate à la vice-présidence ou du commentateur de Fox News, présente des caractéristiques inusitées.

Et bel et bien inquiétantes.

On assiste en effet à une fusion sans précédent du nationalisme et de la foi religieuse. Le tout résultant en «une vision de l'Amérique comme étant le pays élu par Dieu, ainsi que du libre-marché (ultra) capitaliste comme étant crucial pour l'avenir de la nation», décrit l'hebdomadaire Newsweek en citant Tony Campolo, sociologue, pasteur et proche de Bill Clinton.

Nationalisme et foi, donc: dangereux à manier lorsque pris séparément, ces deux ingrédients deviennent explosifs lorsqu'on les mélange l'un à l'autre. Apparaît alors la doctrine de l'exceptionnalisme américain. Lequel a peu d'équivalents, mis à part l'islamisme additionné de panarabisme (voir la fantasmagorie du «nouveau califat»), dont il n'est pas besoin de décrire l'impact dans le monde réel...

Aujourd'hui, Glenn Beck et Sarah Palin incarnent cet exceptionnalisme dont tous deux affirment qu'il est omniprésent dans l'histoire américaine. Il fut par exemple celui d'un preacher du XVIIe siècle, John Winthrop, lui-même inspiré par Jésus décrivant ses fidèles comme étant  la «lumière du monde».

En assemblée publique, Glenn Beck (qui est mormon) parle de «l'exemple resplendissant d'une contrée où les gens travaillent ensemble dans la paix et l'amitié, vénèrent Dieu et rendent ensemble les choses meilleures». Quant à elle, Sarah Palin travaille à revivifier ce sentiment quasi messianique puisque «nos leaders nationaux ne croient plus en l'exceptionnalisme américain (...) Ils pensent que l'Amérique n'est qu'une nation ordinaire et devrait se comporter comme telle», décrit-elle dans son bouquin, America By Heart, non traduit en français.

On voit donc apparaître aux États-Unis la notion de peuple «élu» ou au destin exceptionnel. Une notion que l'on a vu s'épanouir, au fil du temps et à des degrés divers, dans beaucoup de grands groupes nationaux, ethniques ou religieux.

Tout cela serait anecdotique si la toile de fond de l'élection présidentielle américaine de 2012 - dans moins de deux ans! - n'était en train de se tisser autour de ce corpus national-bondieusien. Si cela s'avère, on verra ainsi une campagne électorale où la droite républicaine, abandonnant même ses vieilles lubies (avortement, mariage gai, etc.) se définira d'abord comme «patriotique chrétienne» et sera surtout soucieuse d'orthodoxie économique, prévoit-on.

Il restera à voir qui sera choisi pour tenter de buter hors du temple un président démocrate de plus en plus mal aimé.