Nous publions aujourd'hui le second éditorial sur le fléau que constitue l'ignorance de l'Histoire.

Depuis son apparition il y a plus ou moins 200 000 ans, l'espèce humaine a surmonté un à un tous les obstacles surgissant devant elle. Elle a survécu aux prédateurs, à la maladie, aux changements climatiques, aux catastrophes naturelles, à la famine, à la guerre, à la violence quotidienne, à l'auto-exploitation, au terrorisme de masse, à la foi et aux idéologies.

On ne réalise pas à quel point la résilience de l'homme est remarquable, de sorte qu'on ne cesse de désespérer quant à sa capacité d'affronter l'avenir.

Agriculture, spécialisation du travail, urbanisation, commerce, science (notamment médicale), mécanisation, domestication des sources d'énergie (de l'âne à l'atome)... Décrivant tout cela, un cours d'Histoire de l'humanité 101 enseignerait comment les éclairs de génie successifs de générations d'êtres humains ont, malgré les reculs occasionnels, amélioré le sort de l'espèce de façon stupéfiante.

Pauvreté, maladie, guerre et violence seraient aujourd'hui à leur paroxysme, comme on ne cesse de le répéter? C'est faux. Tous ces maux existent et existeront toujours, bien sûr, mais ils sont tous en régression. Depuis la révolution industrielle, qui exerce ses effets à partir de 1800, la population de l'Amérique du Nord et de l'Europe de l'Ouest a été multipliée par six; le revenu moyen ajusté à l'inflation a été multiplié par neuf; l'espérance de vie a plus que doublé! Depuis 2007, celle-ci a encore augmenté au Québec, atteignant aujourd'hui 78,9 ans pour les hommes et 83,4 pour les femmes.

Ratissons plus large, maintenant.

Entre 1955 et 2005, la population de la planète a doublé, en dépit de quoi la pauvreté absolue (moins d'un dollar de 1985 par jour) a diminué de moitié. Le revenu moyen a été multiplié par trois. Et l'espérance de vie a augmenté de 33%... malgré les hécatombes dues au SIDA, à Mao, à Pol Pot et à d'autres tragédies (Congo, Sierra Leone, Éthiopie, Rwanda).

La guerre et la violence frappent davantage les sociétés tribales de chasseurs-cueilleurs, dont 87% connaissent au moins une guerre annuellement et où 30% des mâles adultes meurent par homicide; avant la révolution industrielle, l'assassinat était dans nos sociétés 10 fois plus courant, par personne, qu'aujourd'hui...

«Il est probable qu'en 2110, l'humanité se portera encore beaucoup, beaucoup mieux qu'aujourd'hui, tout comme son environnement. (Il faut juste que) l'être humain s'ouvre au changement et se montre raisonnablement optimiste», écrit l'homme de science, journaliste et auteur Matt Ridley dans The Rational Optimist (considéré comme l'un des essais importants de l'année, non traduit en français, source de la plupart des chiffres ci-haut).

Nous serions tentés d'ajouter: cessez de croire toutes les sornettes que racontent les prophètes de malheur et faites-vous davantage confiance. À vous-mêmes et à votre espèce.