Le mouvement de François Legault devrait-il former une coalition avec l'Action démocratique du Québec? Ensemble, auraient-ils une chance de mener une chaude lutte au Parti libéral et au Parti québécois aux prochaines élections?

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Richard Vigneault

Consultant en communication et membre de l'Idée fédérale

POURQUOI CHANGER?

Le résultat des élections fédérales invite à beaucoup de prudence. Le changement radical qui s'est produit sur l'échiquier fédéral peut-il se répéter au Québec? Les électeurs ont au moins 18 mois pour évaluer l'impact du choix du 2 mai et réfléchir à cette question: changer pour simplement changer est-il un geste conséquent et susceptible de servir l'intérêt général? En 2007, l'ADQ a été portée par une vague qui s'est brisée sur les récifs de la réalité politique. L'engouement s'est évanoui aussi rapidement qu'il était arrivé. L'ADQ de Deltell et la coalition de Legault s'attirent comme des aimants, sachant très bien, sans encore l'admettre, que chacun a besoin de l'autre. Que donnera cette union? Un parti de droite avec la volonté de tout remettre en question pour se distinguer des autres? Ce parti à deux têtes ira-t-il retirer des appuis au PQ ou au PLQ? Les électeurs vont-ils réserver à la formation de Pauline Marois le même sort qu'ils ont fait subir au Bloc? La persistance des libéraux à prioriser l'emploi et l'économie sera-t-elle plus forte qu'un changement incertain? Les questions sont nombreuses et les réponses... prématurées.

Mathieu Bock-Côté

Chargé de cours en sociologie à l'UQAM

RÉALIGNEMENT QUÉBÉCOIS

Depuis le départ de Mario Dumont, l'ADQ est passée d'un positionnement nationaliste de centre droit à un autre qui est celui d'une droite provincialiste décomplexée. Elle a néanmoins le privilège d'exister et pourrait pour cela servir de véhicule à une éventuelle union du «centre droit» en s'ouvrant à la mouvance «lucide» associée à François Legault. Reste à savoir qui en définira les termes. On voit d'ici les difficultés. L'ADQ devra s'émanciper de son populisme libertarien (comme elle a péniblement cherché à le faire ce week-end) alors que François Legault devra se défaire de sa complaisance technocratique caractéristique de la «gauche efficace» dont il s'est longtemps réclamé et qui évacue les questions culturelles et existentielles au nom de la seule gestion administrative des «vraies affaires». Mais pour le meilleur comme pour le pire, il existe un vaste créneau électoral au «centre droit». Le Québec est en attente d'un réalignement politique majeur depuis une décennie. Dans ce scénario, le PQ risque d'être la première victime d'un déclassement comme l'a déjà subi l'Union nationale. Pour l'éviter, il ne devra pas se contenter de proposer l'alternance au gouvernement Charest. Il devra plutôt développer une stratégie de polarisation sur des thèmes où la coalition Legault risquerait l'éclatement. Le peut-il? Cela reste à voir.

Marc Simard

Professeur d'histoire au collège François-Xavier-Garneau à Québec

LES FIANÇAILLES AVANT LE MARIAGE

Avec son bassin de 15% à 20% des électeurs, sa présence sur la scène parlementaire et son réseau de militants, l'ADQ est un grand navire dont le capitaine est un populiste énergique qui aura toutefois de la difficulté à le mener à la majorité électorale tant par manque d'expérience que parce qu'il n'est pas assez rassembleur. De son côté, François Legault est un navigateur chevronné qui est entouré d'officiers, mais manque de marins et, surtout, dispose d'une embarcation qui est trop frêle pour affronter les tempêtes. Leur mariage semble donc logique, mais il n'est pas dit qu'il soit possible ou souhaitable pour le moment. En effet, une fusion entre l'ADQ et la CAQ apporterait à la première de la crédibilité (et un chef charismatique) et la forcerait à abandonner certaines propositions radicales et populistes pour naviguer dans les eaux de la responsabilité fiscale, où l'attendent déjà un bon nombre d'électeurs. Mais il faut s'attendre à ce que plusieurs députés et militants du parti refusent de le laisser arraisonner par le clan Legault, dont certaines orientations sont encore nébuleuses. De même, bien que la proie adéquiste soit alléchante pour M. Legault, lui permettant notamment de gagner du temps et de ménager ses énergies, il n'est pas certain qu'il soit disposé à avaler toutes les couleuvres que requerrait cet abordage, ne serait-ce que les orientations de la droite morale qui niche à l'ADQ. En somme, une fusion est difficile, et même risquée, mais un accord électoral où les deux formations se partageraient les circonscriptions à la suite d'un accord valable pour les prochaines élections provinciales serait beaucoup plus facile à négocier et potentiellement létal aussi bien pour le PQ que pour le PLQ. La coalition (ou même la fusion) pourrait suivre.

Marc Simard

Guy Ferland

Enseignant de philosophie au collège Lionel-Groulx à Sainte-Thérèse

UN RESSAC ADÉQUISTE?

S'il veut se présenter aux prochaines élections provinciales à la tête d'un parti organisé et crédible, François Legault devrait former une coalition avec l'ADQ. Ainsi, il pourrait faire une chaude lutte au PQ et au PLQ. La popularité de François Legault et la volonté de changement des électeurs pourraient complètement changer la donne politique au Québec. Le vague orange fédéraliste pourrait se transformer en ressac adéquiste au provincial. Ce ne serait pas la première fois que les électeurs québécois passent de la gauche à la droite entre deux élections. Le plan d'action de François Legault rejoint en partie les orientations du parti actuellement dirigé par Gérald Deltell. La popularité de M. Legault, selon les sondages récents, pourrait attirer plusieurs électeurs vers l'ADQ s'il prenait la tête du parti ou d'une coalition. Est-ce que le recentrage de l'ADQ en fin de semaine représente une main tendue vers l'ancien ministre du PQ? Est-ce que ce glissement politique de l'ADQ vers le centre va obliger le Parti libéral à se repositionner sur l'échiquier québécois? Le PQ au centre gauche et l'ADQ ou une coalition au centre droit, que reste-t-il d'espace pour le Parti libéral? Une nouvelle joute politique s'annonce sur la scène québécoise avec Legault à la tête d'un parti de coalition avec l'ADQ.

François Bonnardel

Député de Shefford

FRANÇOIS LEGAULT EST BIENVENU!

Cette fin de semaine, 400 militants de l'Action démocratique du Québec se sont réunis à Trois-Rivières pour notre conseil général. Tous unis derrière notre chef Gérard Deltell, et forts d'un sondage qui nous met à un niveau jamais atteint depuis plus de deux ans, les adéquistes ont confiance en l'avenir de notre parti. Il faut se rappeler qu'il y a 18 mois à peine, au terme d'une course à la chefferie déchirante, Gérard Deltell a repris un parti dont plusieurs avaient rédigé l'avis de décès. Avec son équipe, il a démontré un leadership incroyable et nous a insufflé un nouvel élan. À l'extérieur des partis politiques, on voit le Réseau Liberté-Québec et la coalition de François Legault réfléchir à l'avenir du Québec. Les deux groupes se penchent sur différentes thématiques et sur une vision de droite pour le Québec. Ils contribuent activement au débat public, et leur présence est intéressante. Avec Gérard Deltell à sa tête, l'Action démocratique du Québec mènera assurément une chaude lutte au Parti libéral de Jean Charest et au Parti québécois de Pauline Marois lors des prochaines élections. Si François Legault et son groupe souhaitent s'ajouter à l'équipe du changement et travailler à l'élection d'un gouvernement adéquiste, ils sont plus que bienvenus!