La série «Les femmes en affaires» diffusée récemment sur les ondes de Radio-Canada a certainement soulevé des passions et des questionnements tant chez les hommes que chez les femmes du Québec. On y a, entre autres, entendu qu'au rythme actuel, il faudrait de 50 à 70 ans pour atteindre la parité au sein des conseils d'administration.

Les causes identifiées sont nombreuses et n'ont probablement surpris personne: pas assez de femmes présidentes, surtout à cause du choix de plusieurs de préférer la conciliation travail-famille; d'un mode différent de communication qui fait qu'elles n'expriment pas toujours suffisamment clairement leur souhait d'accéder à ce poste ultime; d'une peur de se mettre à risque en acceptant un poste de ce calibre; et j'en passe.

En plus de s'interroger sur les causes du  peu de femmes dans les plus hautes sphères des affaires, la journaliste de Radio-Canada a, bien à propos, demandé pourquoi il faudrait insister pour y augmenter le ratio femmes-hommes? Les personnes interviewées ont indiqué qu'à leur avis, de même que selon diverses études, la diversité et la complémentarité des talents, visions et opinions, ajoutent de la valeur aux organisations et que l'ajout de femmes est l'un des moyens possibles et nécessaires pour augmenter cette diversité.

Dans cette série, l'une des invitées indique qu'elle croit en la nécessité d'imposer des quotas de parité au sein des conseils d'administration, comme cela se fait déjà dans certains pays, alors qu'un autre participant dit qu'il ne faut pas nécessairement recruter des femmes, mais plutôt s'assurer de recruter les meilleurs candidats.

L'on pourrait croire qu'il s'agit là de positions divergentes. À mon avis, elles sont plutôt complémentaires et la solution se trouve probablement dans l'imposition de quotas à pourcentage progressifs sur un certain nombre d'années.

Mais encore faut-il que les conseils d'administration modifient d'abord leurs exigences. À ceux qui diraient que l'on ne pourra recruter les meilleurs si l'État oblige un quota étant donné le faible pourcentage de femmes présidentes d'entreprises, il faut répondre que les meilleurs éléments ne se trouvent pas nécessairement et uniquement chez des ex-présidentes d'entreprise.

Les femmes professionnelles telles que comptables, ingénieures, actuaires ou avocates, tout comme les femmes qui ont occupé des postes de haute direction dans des secteurs spécialisés, comme ventes et marketing, informatique, ressources humaines, service à la clientèle, possèdent des compétences et une expertise qui peuvent grandement ajouter de la valeur aux discussions d'un conseil d'administration.

Ces conseils peuvent avoir accès à des dizaines, voire des centaines, de candidates qualifiées par le biais de banques et répertoires spécialisés tels que ceux du Collège des administrateurs de sociétés, l'Institut des administrateurs de sociétés, l'Association des femmes en finances, les associations professionnelles et les firmes de placement.

De leur côté, les professionnelles intéressées à joindre les rangs de conseils d'administration devraient travailler à augmenter leur probabilité d'être sélectionnées en développant leur expertise d'administratrices, en joignant des conseils d'administration à but non lucratif et en poursuivant l'une des formations disponibles à cet effet.

Je suis moi-même membre de conseils d'administration qui ont modifié leur approche de sélection et ont fait le choix de privilégier l'expertise spécialisée et la diversité. Au fil des ans, des postes d'administratrice au sein d'entreprises de plus en plus grandes m'ont été accessibles, celles-ci y voyant sans aucun doute un avantage à recruter une femme avec une expérience de cadre supérieur spécialisée en service à la clientèle.

J'invite donc les organismes et entreprises à prendre le risque calculé de sélectionner des femmes qualifiées, sans qu'elles n'aient par ailleurs déjà accédé au plus haut niveau de la pyramide organisationnelle.