À la fin de la Seconde Guerre mondiale, le Canada était l'un des rares pays à disposer des technologies et des matières premières nécessaires à la fabrication de l'arme nucléaire. Mais les dirigeants canadiens de l'époque, révulsés à juste titre par le spectacle d'Hiroshima et de Nagasaki vitrifiées, tournèrent le dos à la bombe atomique. Et ils décidèrent d'encourager plutôt la négociation d'un accord international qui aurait pour effet de limiter la propagation du feu nucléaire et de mettre l'humanité à l'abri de l'anéantissement.

Lester Pearson était pourtant le premier à voir que tout retour en arrière était impossible. Dans ses mémoires, il exprima son découragement devant le danger nucléaire qui s'était fait jour au lendemain du dernier conflit mondial, notant avec tristesse que la victoire alliée n'avait garanti la paix en rien.

Malheureusement, le futur prix Nobel de la paix avait raison, et le monde a vécu 45 ans dans un état de paix armée où les deux grands blocs du temps menaçaient de s'annihiler l'un l'autre. Les hommes et les femmes de bonne volonté se sont donc réjouis lorsque la Guerre froide a pris fin, et dans l'euphorie qui régnait alors, nous étions nombreux à croire que l'on finirait enfin par étouffer une fois pour toutes la menace nucléaire.

Cet espoir a été déçu.

L'arme nucléaire n'est plus le monopole des Grands. Son acquisition est imminente dans certains pays. Et qu'on ne s'attende pas à ce que les nouveaux maîtres de la puissance nucléaire adhèrent à la doctrine de la destruction mutuelle assurée qui, ironie de l'histoire, a contribué à maintenir la paix entre l'OTAN et le Pacte de Varsovie pendant la Guerre froide.

Nous vivons aussi à l'époque du terrorisme international, un temps où il se trouve des gens prêts à s'immoler pour une cause qu'ils estiment indépassable. Il n'est pas exclu qu'un jour, des kamikazes aient accès à des armes ou à des matériaux nucléaires.

II est donc rassurant de voir un nombre croissant de dirigeants inviter les gouvernements à régler de toute urgence le problème nucléaire. Le président Obama a ouvert le débat aux États-Unis, et d'anciens gouvernants de l'Australie, de la Belgique, de la France, de l'Allemagne, de l'Italie, des Pays-Bas, de la Norvège, de la Pologne, du Royaume-Uni et des États-Unis réclament des mesures. On a mis de l'avant une série de propositions précises pour faire en sorte que l'arme nucléaire soit neutralisée pour toujours.

Nous croyons que la prolifération des armes atomiques fait peser sur l'avenir de l'humanité une menace comparable à celle que nous connaissions au terme de la Seconde Guerre mondiale. Le monde ne manque pas de bonnes idées pour maîtriser la situation, mais si rien n'est fait, le pire pourrait arriver.

Nous tenons donc à marquer notre appui à l'initiative de nos collègues d'Australie, de Belgique, de France, d'Allemagne, de l'Italie, des Pays-Bas, de la Norvège, de la Pologne, du Royaume-Uni et des États-Unis, et invitons les gouvernements et les populations à exiger des actes qui écarteront la catastrophe.

MM. Chrétien et Clark ont été premier ministre du Canada. M. Broadbent a dirigé le Nouveau Parti démocratique. M. Axworthy a été ministre des Affaires extérieures.