La reprise des pourparlers directs entre Mahmoud Abbas et le gouvernement israélien a suscité un renouveau d'espoir et des couvertures médiatiques enthousiastes. Mais l'embûche principale -la consolidation du contrôle israélien sur les territoires occupés- est rarement mentionnée. C'est cette embûche-là qui donne des raisons d'être pessimiste.    

Cela fait plus de 17 ans que des pourparlers directs ont été établis entre Israéliens et Palestiniens. Les accords d'Oslo de 1993 avaient marqué un véritable tournant dans le conflit et avaient suscité un immense espoir, même si la reconnaissance mutuelle n'était pas symétrique.

En effet, alors que les Palestiniens reconnaissaient officiellement l'État d'Israël, le terme «État palestinien» n'apparaît nulle part dans les accords. Les conditions concernant le gel de l'expansion des colonies étaient formulées de telle façon qu'Israël a pu les étendre allègrement tout en prétendant que la lettre des accords n'était pas violée.

Dans les sept années qui ont suivi, le nombre de colons a doublé, passant de près de 200 000 à plus de 400 000, en violation des Accords de Genève de 1949 qui régissent le contrôle israélien sur les territoires occupés. Le territoire palestinien a été morcelé en 64 petits bantoustans séparés par des points de contrôle israéliens. Les conditions économiques et sociales des Palestiniens se sont grandement détériorées.

En 1993, l'écrasante majorité des Palestiniens appuyaient le compromis historique qui leur était proposé : renoncer définitivement à leur terre d'origine, mais pouvoir construire un État viable sur les 22% qui en restaient. Les groupes qui refusaient ce compromis étaient marginaux et le Hamas n'avait l'appui que de 4% de la population. Mais la poursuite de l'occupation et la consolidation du contrôle israélien sur la Cisjordanie et sur Gaza ont détruit les espoirs palestiniens et ont légitimé à ses yeux toute forme de résistance.

Durant ces 17 années, les pourparlers ne se sont jamais interrompus longtemps, et des ententes partielles ont été signées: l'accord intérimaire de 1995, le protocole de Hébron (1997), le mémorandum de Wye River (1998), les pourparlers de Camp David (2000), les négociations de Taba (2001), la feuille de route proposée par le Quartet (2003), les propositions d'accords de Genève (2003), et finalement la Conférence d'Annapolis. Les protagonistes se sont longuement parlé.

Tout au long de ces processus, les gouvernements israéliens successifs clamaient haut et fort qu'ils ne renonceraient jamais à la poursuite de la colonisation qui, rappelons-le, viole le droit international. Et les demandes faites à Israël ont atteint des proportions homéopathiques: dans la foulée d'Oslo, on demandait à Israël d'évacuer les territoires occupés. Ces conditions ont été graduellement assouplies, et aujourd'hui, le président Obama a tordu le bras de M. Abbas pour qu'il négocie avec Israël même si ce dernier continue à étendre ses colonies. Le concept de paix proposé par le premier ministre Netanyahou et ses prédécesseurs consiste à mettre fin à la résistance des Palestiniens mais pas à l'occupation qui se poursuit et même qui s'accélère.

Il est possible que M. Abbas soit contraint de conclure certaines ententes avec Israël. La formulation des conditions sera assez vague pour permettre à Israël de continuer à consolider sa présence dans les territoires occupés, mais leur sens sera assez clair pour que la société palestinienne dans son ensemble (et pas seulement le Hamas) refuse, diminuant ainsi le peu de légitimité qu'il reste à M. Abbas.

Tans qu'il n'y aura pas des pressions directes, explicites, et sérieuses pour qu'Israël mette fin à son occupation, Israël ne fera aucune concession sérieuse et la situation va continuer à se détériorer. Pour cela, on ne peut plus compter sur les gouvernements occidentaux. Heureusement, les sociétés civiles occidentales et un nombre croissant de juifs israéliens et occidentaux ont compris et demandent maintenant qu'un boycott et des sanctions soient exercées contre Israël, seuls moyens pacifiques de pression qui restent pour l'amener à mettre fin à l'occupation.