C'est l'été. Je nous souhaite du soleil. Vous aurez remarqué qu'à chaque nouveau record de la météo, la sagesse collective invoque le réchauffement de la planète comme cause probable du dérèglement ressenti. Ce qui est généralement faux. Les changements climatiques, imputables aux émissions de gaz à effets de serre (GES), s'évaluent dans la longue durée.

Malgré les règlements incitant à réduire les émissions de GES et les millions pour promouvoir le développement des énergies renouvelables, la reprise économique de 2010 s'est accompagnée de la plus forte hausse de GES depuis 1969. Tout récemment, on apprenait que, poussée par sa croissance accélérée, la consommation d'énergie de la Chine dépasse désormais celle des États-Unis. Sans surprise, l'activité productive (tous systèmes économiques confondus) pollue.

Ralentir n'est pas la solution. Au contraire, on doit souhaiter la croissance; les surplus peuvent alors être canalisés, sous forme d'investissements, vers la protection de l'environnement et les nouvelles énergies. Après le rapport Brundtland (1987), le Sommet de Rio de 1992 (20 ans!), et le protocole de Kyoto (1997), on constate trop peu de progrès tant sur le plan national qu'au niveau international.

Dans son livre Global Warming Gridlock (2011), David G. Victor explique tout ce qui ne va pas dans nos stratégies. Le problème n'est pas technologique ni économique, il est politique. Ainsi, la taxe sur le carbone est de loin la solution la plus rationnelle. Elle confie au marché l'arbitrage délicat entre les coûts et les bénéfices associés au transfert des ressources depuis les activités polluantes vers d'autres plus propres. Parce que les coûts sont concentrés chez les gros pollueurs - dont dépend l'essentiel de la production - et que les bénéfices sont dilués au point d'être intangibles, le jeu démocratique rend la taxe sur le carbone inapplicable.

À l'international, la stratégie qui consiste à fixer des cibles de réduction des GES et à convenir d'un échéancier ne fonctionne pas. L'approche du consensus onusien n'est pas adaptée. Malgré les promesses faites, aucun gouvernement ne peut prévoir les émissions des GES qui émaneront de son activité économique. Un traité international, même assorti de sanctions, n'y changera rien.

Il faut prendre le problème à l'envers. Tout au plus, une douzaine de pays (dont le Canada) sont responsables des trois quarts des émissions, disposent de la technologie, des ressources et de la capacité de mobilisation politique pour appliquer des mesures sérieuses de contrôle. Commençons avec ceux-ci, à la manière d'un club (comme dans les premières années du GATT où une poignée de pays a réalisé l'impossible, soit libéraliser le commerce international). Comme la Californie, qui avec ses politiques de contrôle des émissions définit des standards et inspire le reste de l'Amérique, agissons par l'exemple et soyons pragmatiques. Pour convaincre la planète, il faut nettoyer chez nous.

La réduction des émissions de GES passe par un système de plafonnement et d'échanges (cap and trade) complété par une régulation plus serrée. L'effort public visant au développement des technologies doit être accentué et l'adoption des énergies propres facilitée.

On ne peut pas faire l'économie de la politique ni ignorer les groupes d'intérêts. La régulation comme les stimulants financiers sont sensibles aux jeux de pouvoir et à la distribution des coûts de l'adaptation. Des modèles existent. Après la Californie, il y a l'Allemagne où le Parti vert gouverne au Bade-Wurtemberg. La chancelière Angela Merkel, sentant le pouls de l'électorat à la suite du tsunami de Fukushima, a annoncé l'abandon progressif du nucléaire.

Au Québec, notre avantage hydroélectrique est un prétexte à l'inaction. La pollution appréhendée du gaz de schiste mobilise davantage que celle qui nous asphyxie aujourd'hui. Puisque le transport est notre principale source d'émissions de GES, à quand l'inspection des véhicules? Alors, on pourra s'attaquer sérieusement aux systèmes de chauffage puis aux industries.