Pour augmenter le taux de réussite dans les écoles, les enseignants se font demander de hausser artificiellement les notes des élèves. Depuis l'automne dernier, les professeurs disent subir des pressions pour diminuer leurs exigences envers les jeunes afin d'atteindre les cibles de réussite. Approuvez-vous cette demande du ministère de l'Éducation aux commissions scolaires de la province de prendre des mesures pour augmenter le taux de diplomation?

MERCI DE NOUS AVOIR FAIT PARVENIR VOS COMMENTAIRES

Supportons la relève

Je suis à la retraite, et de retour au Québec, ayant vécu à l'extérieur six mois par année depuis 30 ans.   Autrefois, on pouvait faire une projection des études depuis la maternelle jusqu'à la maîtrise.    Des éducateurs de plusieurs pays venaient ici, au Québec, pour voir le meilleur système d'éducation au monde, et maintenant, on va tricher avec les résultats des examens, pour faire avancer nos enfants, non pas en éducation, mais en falsifiant les résultats.  Cette tricherie ne servirait qu'à jeter de la poudre aux yeux, ce qui ne durerait pas longtemps, quand nos jeunes feront face à des candidats qualifiés pour l'obtention d'un travail. Pire encore, notre réputation serait détruite, par les erreurs faites par des gens qui par ailleurs ont tous leur diplôme.  Il ne faut pas baisser la barre, mais la relever et, pour que nos jeunes ne décrochent pas, leur offrir un support adéquat, par des professeurs qualifiés, en nombre suffisant, et pour cela aussi payer ces professeurs, pour attirer les gens les plus qualifiés dans cette profession, et les garder.   La jeunesse est la richesse d'un pays, prenons-en soin de façon adéquate, supportons nos espoirs de demain et n'oublions pas les parents, qui souvent sont confus devant tous les changements et les détours dans le système de l'éducation.

Claude Guillemette

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Un sophisme

J'enseigne au cégep depuis maintenant vingt ans et je constate que, de plus en plus, les élèves qui nous arrivent du secondaire maîtrisent de moins en moins la langue française. Les notes gonflées existent depuis un bon nombre d'années, mais voilà maintenant que l'on rend cette pratique publique. Lorsque je suis arrivé au cégep, la moyenne des élèves qui réussissaient le test d'entrée en français dans les différentes universités québécoises se situait à près de 55 %. On a fait croire à la diversité des examens entre les universités pour les remplacer par l'épreuve uniforme de français, à la fin du troisième cours de français au cégep. Par miracle, les étudiants réussissent cet examen à tout près de 85 %. Croyez-vous à ce soudain bond de 30 %? C'est le miracle de l'approche par compétence, vous me direz.  C'est un secret de polichinelle que le MELS s'organise pour qu'il y ait grosso modo près de 80 % de réussite au niveau provincial à l'épreuve d'écriture de la cinquième secondaire. Cette exigence vient maintenant de tomber d'un palier plus bas soit au niveau régional. C'est la preuve que la réforme de l'enseignement par compétence est la pierre philosophale en éducation. Nous en sommes rendus à trafiquer les notes à tous les paliers pour faire la démonstration par l'absurde de ce qui n'existe pas réellement. C'est ce qu'on appelle un sophisme.

Gilles Parent, Gatineau

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Le ministère de l'Éducation a-t-il le choix?

La plupart des employeurs exigent maintenant un diplôme de 5e secondaire pour des emplois manuels et non spécialisés, alors que cela n'était pas une exigence il y a 35 ans. Comme le bagage de connaissances à acquérir est sans cesse grandissant, il est illusoire de penser que tous les élèves peuvent réussir un 5e secondaire, alors que ce n'était pas non plus possible dans les années 70. Si les employeurs maintiennent leur volonté d'embaucher des jeunes ayant décroché leur diplôme d'études secondaires pour leurs emplois non spécialisés, le ministère n'a d'autre choix que d'abaisser le niveau exigé pour l'obtention de ce diplôme, pour que ces employeurs aient des candidats qui répondent à leurs critères d'embauche.

Micheline Gaudreau

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Un message négatif

Je trouve que c'est une mesure aberrante, et c'est dommage aussi pour les jeunes, qui eux, travaillent fort.  Ils ne seront plus récompensés pour leur travail. Quel est le message que l'on donne comme société: que dans la vie, on va te donner tout, tout cuit dans le bec. Ils seront pas mal déçus à l'âge adulte...

Julienne Tremblay

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Le scoop du siècle

Je suis enseignant en français depuis près de 30 ans. Je peux vous dire que j'en ai vu des aberrations. La dernière en date m'est venue par le biais d'une information privilégiée. L'équipe de correction de l'examen de français de cinquième secondaire du ministère aurait reçu comme consigne stricte et formelle «et secrète» que 80% des élèves devaient réussir l'examen de mai - quitte à reprendre la correction pour rejoindre la cible. Alors, voici le scoop du siècle, je vous annonce avec six mois d'avance que 80% des élèves du Québec auront «réussi» leur examen de français de cinquième secondaire de 2011!

Claude Belcourt, Montréal

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Même y penser défie l'entendement

Comment croire en un système quand nos politiciens favorisent et encouragent de telles méthodes? Comme si des notes plus élevées garantissaient la compétence! Ce stratagème sur le dos des jeunes horripile et donne une très mauvaise opinion de ces maîtres qui s'abaissent à des connivences aussi basses. Pour quand une marche dans la rue de tous les enseignants pour dénoncer cette incurie de nos hommes politiques qui «trafiquent» les diplômes en trompant les administrés? Les favorisés du système seront toujours les amis de celui-ci. Pendant ce temps, notre Québec d'aujourd'hui est loin d'avoir fière allure et donne à penser que tout est permis dans notre beau monde.

J. Roland Breton

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C'est un faux débat

Quand les étudiants, de quelque niveau qu'ils soient, seront motivés et se retrouveront dans un cadre humain, les notes deviendront superflues. L'idéal, ce ne serait pas que les notes reflètent mieux la réalité, ce serait que le milieu d'éducation permette aux jeunes de s'épanouir et d'apprendre. Ce serait que les jeunes soient passionnés par l'école. Ils seraient dès lors aussi performants qu'on peut l'être quand on aime profondément ce que l'on fait. Je me demande si les formes d'évaluations sur lesquelles est basé tout le système scolaire, du primaire à l'université, ne sont pas une vaste comédie. L'intelligence n'est jamais fournie par un diplôme ou par de bons résultats à des examens. Il est vrai que les enfants dociles réussissent mieux à l'école, ce qui n'empêche pas les moins dociles d'être intelligents. Je ne suis pas pour un nivellement par le bas, bien au contraire, mais plutôt pour une vraie réflexion sur le sens et l'importance de l'apprentissage et du développement du plein potentiel de l'individu. Est-ce vraiment possible dans le système actuel? Bref, ça m'est parfaitement égal que les notes soient ou non le reflet d'une réalité qui, de toute façon, est totalement subjective. Je suggère la lecture d'un livre inspirant et rafraîchissant sur la question du grand penseur qu'a été Krishnamurti: de l'éducation (1965). Sa réflexion va beaucoup plus loin qu'un simple débat de chiffres.  

Diane Letendre

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Le hold-up de l'éducation

J'ai travaillé auprès des jeunes pendant plus de 40 ans, profondément attristé de constater l'inexorable déclin généralisé du niveau de connaissances à tous les niveaux. Pas besoin d'un doctorat pour s'en apercevoir. Le paradoxe: jamais autant d'accès à l'information, jamais autant de vides cérébraux. Le comble! Le drame! Une société se tire une balle dans le pied et peut-être ailleurs, si elle se leurre et laisse son propre gouvernement traficoter, entre autres, le gonflement des notes de sa propre relève. Rien, mais absolument rien de positif ne ressortira de tout ce bourbier à moyen et à long terme. Estime de soi perdu à court terme pour certains, à cause de basses notes réelles. Attendez voir la dépression collective, si ce hold-up de l'éducation n'est pas résolu une fois pour toutes. Un diplôme ne vaudra même pas le papier sur lequel il sera imprimé... peut-être avec des fautes d'orthographe. Y a-t-il un pilote dans l'avion long trajet?

Jean Poirier, ancien député de l'Assemblée législative de l'Ontario

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Une insulte à l'intelligence

Je n'approuve absolument pas ce que le ministère demande aux enseignants. J'ai une fille qui commence l'école à l'automne et je m'inquiète de son avenir et de notre avenir à tous, puisque ce sont eux qui sont le monde de demain! Les compétences restent des compétences et l'on sait depuis longtemps qu'on peut faire dire ce qu'on veut aux chiffres. Alors, même si les étudiants de nos écoles ont de belles notes à mettre dans les statistiques, ils n'en seront pas nécessairement plus compétents. Tout ce que ça permettra de prouver, c'est que nous avons un gouvernement paresseux, qui se cache derrière les apparences, plutôt que de travailler à améliorer le sort et les compétences des citoyens. De plus, c'est une insulte abominable à l'intelligence et à la bonne volonté des professeurs qui ont étudié et qui croient à ce qu'ils font.

F. Privé, Granby

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La pire calamité

C'est la pire calamité après le nivellement par le bas. Les examens de fin d'année à tous les niveaux, de la première année du primaire à la fin du secondaire, devraient être les mêmes pour toutes les écoles du Québec. Quant au projet de M. Legault d'évaluer les enseignants, il rencontrera sûrement le syndicat des enseignants sur sa route, et s'il maintient quand même ce projet, je crains qu'un grand nombre d'enseignants perdront leur emploi ou, au mieux, devront eux-mêmes se recycler.

Paul Lafrance, Québec

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Réussite scolaire

Le ministère de l'Éducation fait fausse route en exigeant aux enseignants de hausser artificiellement les notes des élèves afin d'augmenter le taux de réussite scolaire. La réussite scolaire d'un jeune est l'affaire de tous et l'enseignant ne devrait pas avoir seul le poids de la réussite des élèves. En effet, les commissions scolaires sont tenues de se doter de plans stratégiques depuis 2002 mettant de l'avant différentes actions afin de donner aux jeunes le goût de l'étude et d'augmenter le taux de réussite. Il manque encore quelque chose, car après des années de progrès, de hausse du niveau de formation des jeunes, le système éducatif du Québec peine encore à remédier à l'échec scolaire. Contrairement à ce qui est véhiculé, ce n'est pas en agitant des dollars supplémentaires devant les yeux des enseignants que l'on réussira à les motiver, car certains sont au bout du rouleau quand ils ne claquent pas tout simplement une dépression. De plus, on sait que tous les enfants n'ont pas les mêmes chances au départ, les conditions de vie, de santé, d'équilibre qui leur permettent, sans accompagnement, d'accéder aux apprentissages et de se projeter dans l'avenir. Le plan d'action devait contenir des moyens pour aider les jeunes les plus en difficulté, former les enseignants pour cela et combattre les inégalités sociales. Il va de soi qu'ouvrir un avenir positif pour tous les jeunes est indispensable et c'est pourquoi l'école doit réussir à se transformer.

Jocelyn Boily, Québec

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Opposez-vous à ces mesures

Voilà la raison du pourquoi, lorsque j'étais directeur, je m'étais opposé publiquement à l'ex-ministre de l'Éducation, François Legault, lors de son passage à notre école, pour promouvoir son fameux Plan de réussite, lequel nous exigeait d'atteindre de meilleurs taux artificiels de réussite des élèves. Ce qui nous procurait alors un genre de petite enveloppe brune budgétaire. Et, croyez-moi, je me sentais bien seul dans ce refus, mais je tenais mon bout. J'avoue aujourd'hui que j'ai fabriqué des objectifs artificiels de taux de réussite, sans aucune analyse quelconque, à la demande de la commission scolaire, mandataire des objectifs du MELS. Conséquemment, lors de l'élaboration du Projet éducatif de l'école, m'opposant toujours à ces mesures artificielles, la commission scolaire m'envoya même un émissaire pour que je change celui-ci, car j'y dénonçais ces conneries et, oh blasphème, j'exigeais du MELS des correctifs pédagogiques! Message aux enseignants: opposez-vous à toutes mesures qui vous contraindraient à augmenter artificiellement les résultats scolaires des élèves ou qui vous contraindraient à baisser vos exigences scolaires. Vous avez mon appui indéfectible!   

Jacques Robert, ex-conseiller d'orientation, ex-directeur adjoint, ex-directeur, ex-enseignant

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J'ai décroché

J'ai enseigné pendant 20 ans dans un collège privé de Laval. En 2007, j'ai été rencontré par mon directeur pédagogique qui m'a imposé de réduire mon taux d'échec. J'avais alors la charge des étudiants en mathématiques et le taux d'échec de mes élèves tournait autour de 15% annuellement. J'offrais à l'époque, tout comme quelques-uns de mes confrères, des récupérations gratuites à volonté, le matin avant les cours et après l'école, des travaux supplémentaires et des sessions de préparations aux examens. Certains de mes élèves en situation d'échec ne se présentaient à aucune des occasions de perfectionnement ci-mentionnées et ne parvenaient pas à atteindre les exigences de base pour se mériter une note de passage. Après de multiples discussions, parfois très animées, avec ma direction d'école, je décidais année après année de ne pas augmenter leur note artificiellement, mais plutôt de leur offrir du support et la possibilité de se reprendre. Certains, plutôt résistants, décidaient de ne pas saisir ces dernières chances et échouaient. Toutefois, la pression de réduire le taux d'échec à zéro se poursuivait. Il ne fallait pas «briser les rêves» des enfants. La situation s'est finalement transformée en décrochage: le mien. J'ai quitté ce milieu.

André Barette

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Venez sur le terrain

C'est le comble de l'aberrance de la part de notre ministère de l'Éducation! Y-a-t-il quelqu'un dans ce ministère de l'Éducation qui descend sur le terrain pour voir réellement les besoins des enseignements, afin de les supporter dans leur quotidien avec du personnel spécialisé, qui va réellement aider les enfants en difficulté d'apprentissage? Et croyez-moi, ce ne sont pas eux qui sont le problème, car pour la plupart, selon leur capacité, veulent tous réussir. Ils veulent tous apprendre leur français, leurs mathématiques et l'anglais, pour ne pas être en reste sur le marcher du travail. Il y a ces autres enfants qui arrivent aussi avec d'autres difficultés: des colères mal gérées ou d'autres problèmes et qui se ramassent dans ces classes avec les enseignants qui sont malgré tout pleins de bonne volonté pour accueillir ces enfants, mais, en fin de compte, ils reçoivent des agendas par la tête, des chaises, etc. Ils communiqueront la situation par écrit à la direction de l'école pour les informer que si la situation n'est pas prise au sérieux et que de l'aide n'est pas accordée, ils ne seront plus en mesure de garantir la sécurité de ces élèves. Pour penser à obtenir un taux de réussite, des notes, comme le veut bien notre cher ministère, il faut du personnel, des gens spécialisés pour tous ces élèves qui veulent réussir dans la mesure de leur capacité. À partir de là, on va parler de réussite scolaire. J'invite donc les gens du ministère de l'Éducation à débarquer sur le réel terrain des enseignements, des solutions et vous constaterez à quel point vous en êtes distancés et que les réponses à vos exigences sont dans leur tête.

Nathalie Bouchard, La Prairie

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L'ego des parents

Oui, au primaire, les élèves sont surévalués! Ces derniers, et surtout leurs parents, ne pourraient pas supporter, ni envisager des notes sous la barre des 70% sans parler de «baisse de l'estime de soi-même» ou sans remettre en question les méthodes des enseignants.

Julie Catherine Mercadier, enseignante

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Le ministère des rêveurs

À l'exception du ministère de l'Éducation et des commissions scolaires, personne n'a intérêt à cacher le vrai rendement des élèves, à commencer par les élèves eux-mêmes. Mais à quoi s'attendre d'un ministère toujours empêtré dans le contenu des programmes et de la forme du bulletin après plus de quarante ans d'existence? Il y a plusieurs années j'ai entendu qualifier le ministère de l'Éducation de rêveurs, et je crois de plus en plus que ce ministère s'occupe uniquement à cela. Ce qui résulte de cette demande, qui n'a de sens que pour les spécialistes de l'évaluation, c'est de considérer monsieur et madame tout le monde comme des imbéciles et de les placer dans une situation d'impuissance face à ce ministère. Si l'on s'est fait rappeler par le gouvernement que les parents sont les premiers responsables de l'éducation, il faudrait que sa créature, le ministère de l'Éducation, commence par leur donner l'heure juste sur le rendement réel des élèves et non pas une note nuageuse ou virtuelle. C'est toutefois peut-être hors des capacités de ce petit ministère.

Pierre Mercier

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Une relève boiteuse

Je suis totalement contre cette pratique. Ma fille a fréquenté un collège à sa troisième année de secondaire et elle a abandonné pour retourner au public parce qu'elle avait de la difficulté. Comme elle avait d'excellents résultats, elle ne comprenait pas avoir autant de difficultés à suivre le groupe dans un collège privé. Ça confirme ce qu'on pensait déjà. Quand on dit qu'un enseignant fait reprendre un examen,  parce que la moyenne du groupe est trop basse, ça en dit long sur la façon de fonctionner. Ce n'est pas de cette façon qu'on va former des jeunes pour prendre la relève....

Chantale Picard

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Le nivellement vers le bas

Quand l'augmentation du taux de réussite des élèves et l'augmentation du nombre de diplômés deviennent une obsession, nous sommes alors tout simplement devant une situation de nivellement vers le bas en non vers le haut. En somme, c'est de la parade, de la frime, du mensonge. C'est ainsi que nous avons plusieurs étudiants de cégep et d'université qui ne savent pas écrire. Les diplômes perdent de leur valeur et de plus en plus d'employeurs le savent.  Ce phénomène de nivellement vers le bas n'est pas nouveau et il ne peut être dissocié d'un accès généralisé à l'enseignement primaire et secondaire et également assez ouvert aux études collégiales et universitaires. De fait, nous sommes devant une question fort classique: quantité et qualité peuvent-elles aller de pair? Il semble que ce ne soit pas le cas, mais les avis sont partagés sur le sujet. C'est le vieux débat des « aristocrates contre les démocrates ». Et, comme nous vivons sous un régime démocratique...

Michel Lebel, ancien professeur d'université

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La phobie des notes

J'enseigne au secondaire et la phobie des notes est installée depuis déjà deux ans. Pour hausser la moyenne, il n'est plus possible de mettre un zéro sur le bulletin, même si l'élève ne s'est présenté qu'à la moitié de ses cours et qu'il n'a absolument rien fait de toute l'année! Maintenant, la note la plus basse est 24%. Ce qui a pour effet d'augmenter les moyennes et de laisser croire que les élèves réussissent mieux!

Martin Simard, enseignant au secondaire

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Il y a déjà tant d'aide

On a déjà la réforme scolaire pour aider les étudiants. Il y a tout plein de pédagogues, de groupes d'étude, des bibliothèques,  et j'en passe, pour supporter les étudiants. Et maintenant, les professeurs doivent se plier aux exigences des  étudiants. Comment ces derniers vont-ils apprendre, maintenant que les professeurs baissent les critères d'évaluation pour les faire passer?

Thalia Cherry, étudiante

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Étudiants, à vos bouquins!

J'étudie depuis près de 17 ans. J'ai fait mon éducation primaire et secondaire au Québec, un baccalauréat en Ontario et je poursuis actuellement deux maîtrises à Paris. Il m'a, par conséquent, été possible d'observer plusieurs systèmes éducationnels et de comparer des expériences individuelles, cela à divers âges, dans plusieurs disciplines et dans un nombre appréciable de pays.

Premièrement, admettons ceci : la volonté du ministère de l'Éducation du Québec d'augmenter le taux de réussite est admirable. Une population éduquée est une population consciente de ses droits, de ses possibilités, réfléchie et par conséquent autarcique. Les moyens qu'elle entreprend pour y parvenir sont, cependant, déplorables. De fait, un diplôme n'est pas, en lui-même, signifiant. Il peut, dans un premier temps, donner de meilleures capacités d'emploi - dans certaines disciplines à tout le moins -, mais si le taux de diplomation augmente en flèche, le niveau d'éducation nécessaire pour accéder aux mêmes postes réduit suivant une relation inversement proportionnelle. J'invoquerai ici mon actuelle expérience parisienne. Il s'agit là d'une réflexion basée sur les statistiques universitaires et sur quelques observations évidemment subjectives, mais j'ose croire qu'elle se transpose facilement au cas à l'étude. L'entrée des baby-boomers, dans les années soixante et soixante-dix, a forcé l'augmentation du volume des inscriptions - je ne veux pas ici faire de critique sociale, je n'énonce que des faits -, une réalité encourageante, puisque les masses avaient maintenant accès aux études et le désir d'approfondir leurs champs de connaissances. Une fois les années quatre-vingt arrivées, cependant, le nombre d'étudiants a dégringolé. Pour regarnir les amphithéâtres, les critères d'entrée ont eux aussi chuté, de sorte que les étudiants que je rencontre, au jour le jour, sont peu aptes à la recherche, et même au travail individuel. Je suis, pourtant, dans certains des programmes les plus contingentés, et suis horrifié à l'idée que plusieurs ne puissent pas rédiger une bibliographie, faire un travail en bonne et due forme ou se forger une opinion. « La source de tout ce drame » (dixit Nelligan) : la volonté gouvernementale de ne pas voir le nombre de diplômes décernés réduire. Nous pourrions argumenter et dire que le nombre de diplômes et le taux de diplomation sont deux indices différents. Lorsque le nombre d'étudiants était important, par contre, le taux de diplomation était moindre; désormais, certaines thèses qui ne trouveraient pas grâce devant un jury canadien obtiennent leurs lettres de noblesse; dorénavant, pour que le nombre de diplômes décernés ne varie pas, les critères périclitent, voyez-vous où je veux en venir ou dois-je continuer. Le MELS danse en ce moment sur la corde raide, et peut tomber soit dans la facilité, en augmentant le nombre de diplômes, ce qui compromettrait l'avenir d'étudiants québécois désireux d'apprendre, de progresser et de réfléchir, soit en resserrant l'encadrement des élèves à risque, ce qui engendre, évidemment, des coûts supplémentaires. Plusieurs ont déjà soulevé le problème de l'intégration des élèves en difficulté, et de l'échec relatif de cette mesure. Je ne me prononcerai donc pas sur le sujet - je ne suis pas, d'ailleurs, qualifié pour le faire. Toutefois, un fait me paraît évident : le gouvernement tente de réduire les dépenses. Mais le savoir a-t-il réellement un prix? Si l'on en juge par les lois relatives à la propriété intellectuelle, nous croyons en effet que tout a une valeur. C'est là une constante de la pensée capitaliste. La réalité est par contre fondamentalement différente, et en réduisant les attentes, en ne donnant pas aux élèves le goût d'apprendre, de se dépasser et de dépasser ce qui les a précédés, c'est leur avenir, mais aussi l'avenir de la recherche, bref des sciences comme des sciences humaines et des arts, que le gouvernement compromet et, ipso facto, le rayonnement de la province à l'étranger. De là une question basale : jusqu'où peut-on ou veut-on aller pour quelques kopecks?

Simon-Pier Labelle-Hogue, École normale supérieure de Paris, Université Paris-IV Sorbonne, Université Paris-VIII Vincennes-Saint-Denis

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Être ou paraître

C'est tout à fait ridicule. Bien paraître, c'est tout ce que recherche la ministre.  Combien y en a-t-il qui agissent ainsi et où s'en va notre fierté d'être Québécois? Quand on n'a plus de fierté personnelle, ni d'honnêteté, on perd tout.

Françoise Couture

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Démotivant

Ayant des amies enseignantes et ayant côtoyé une prof, je dois dire que les notes sont généralement fausses. Il arrive plus souvent qu'on le pense que les notes sont haussées pour aider la moyenne, l'élève et aussi le professeur. Le professeur augmente souvent les notes pour éviter les interrogations sur sa méthode d'enseignement et pour faire passer les élèves. A qui la faute? Au programme scolaire. C'est souvent au niveau du secondaire que les notes sont artificielles. Les élèves n'ont pas de plaisir et les professeurs sont au bout du rouleau. Ce n'est pas en imposant plus de français ou de mathématiques que les gens vont mieux maîtriser la langue. Au contraire, ça les démotivent. L'école tue l'adolescence. Si on appliquait les vraies notes, on verrait une baisse de 20% sur la moyenne et ce, sans exagération. J'ai souvent vu que le 0% était en fait 40%. Il devient donc facile de passer, si la note plancher est 40%.

Stéphane Gravel

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Danger

J'espère que madame Beauchamp n'aura jamais à se faire soigner par un médecin ayant obtenu son diplôme à rabais...

Jean-Pierre Mathieu, Rosemère

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Une tricherie indécente

Ce n'est pas nouveau ce procédé. La pondération et la normalisation sont en usage depuis 30 ans et plus. Les élèves le savent et nous disent : « Pourquoi faire des efforts, alors qu'on va réussir quand même? »  Le palmarès des écoles utilise ce truc pour avoir une meilleure cote. C'est indécent de tricher pour éviter le redoublement et avoir une bonne réputation dans le public.

A.M. Courville

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Une idée ridicule

venant du gouvernement et de ses hauts fonctionnaires, plus rien ne me surprend. Personne n'est contre la vertu, donc tous nous pouvons accepter l'idée que les commissions scolaires prennent les mesures pour augmenter le taux de réussite des élèves. Mais de là à simplement bonifier les notes, il y a une marge. C'est bien plus facile de culpabiliser les enseignants dont les élèves réussissent moins bien. Qu'un directeur accuse implicitement son professeur d'être responsable de la diminution de la moyenne des notes et lui demande d'expliquer pourquoi ses élèves ont des notes plus basses que la moyenne indique où sont les priorités du système. C'est pourquoi je suis contre l'idée de M. Legault  d'augmenter les salaires de 20 % à 30 %. Cela ne réglera absolument rien aux problèmes du système. Le travail des enseignants doit être valorisé. Oui, mais tant et aussi longtemps qu'un élève pourra envoyer promener impunément son professeur ou lui faire des menaces très graves et tout cela avec la protection du système, les enseignants seront malheureux. Payés très cher, mais toujours malheureux. Le système doit être repensé et les élèves doivent être récompensés ou sanctionnés selon leurs résultats et attitudes et ce n'est pas à 40 ans qu'ils doivent l'apprendre.

F. Fortin