Effacer des pans de la mémoire ne relève plus de la science fiction affirment des chercheurs qui ont pu induire une amnésie sélective chez des souris transgéniques, selon des travaux publiés mercredi.

Cette recherche parue dans la revue américaine Cell Press du 23 octobre pourrait aboutir à des techniques adaptables au cerveau humain permettant d'effacer la mémoire d'événements traumatisants ou suscitant des peurs incontrôlées sans affecter le restant de la mémoire, selon Dr Joe Tsien, de l'Institut du cerveau et du comportement du Medical College de Géorgie, principal auteur de l'étude.

La mémoire comprend quatre différents stades: la mémorisation, le renforcement, le stockage, et le rappel des informations et événements mémorisés.

Des recherches précédentes ont identifié des molécules spécifiques qui paraissent jouer un rôle dans les différentes phases du processus de mémorisation et de recouvrement de la mémoire.

Le Dr Tsien a mis au point une méthode permettant de manipuler rapidement l'activité de la molécule dite CaMKII (calcium/calmodulin-dependant protein Kinase II), un enzyme lié à de multiples aspects du processus d'apprentissage et de mémorisation.

«Nous avons récemment développé une stratégie qui combine la spécificité moléculaire de la génétique et l'inhibition très rapide à l'aide d'une substance chimique» de l'activité de CaMKII, explique le scientifique.

Les chercheurs ont découvert que l'utilisation excessive transitoire de l'enzyme CaMKII au moment du rappel des souvenirs bloquait la mémoire longue et courte des événements suscitant la peur, ainsi que la mémoire immédiate.

Ils ont découvert que ces trous de mémoire liés à une activité excessive de CaMKII ne résultaient pas d'un blocage mais apparemment de l'effacement rapide de ces informations stockées dans la mémoire du cerveau.

De plus, ces chercheurs ont constaté que l'effacement de ces souvenirs était limité à ceux que le cerveau cherchait à se rappeler, laissant les autres intacts.

Cette recherche qui suggère l'existence d'un mécanisme moléculaire «permettant d'effacer sélectivement et rapidement la mémoire d'événements traumatisants» pourrait s'appliquer aux anciens combattants dont un grand nombre souffre du syndrome post-traumatique, note le Dr Tsien.

Mais il met aussi en garde contre le fait «d'espérer la mise au point à brève échéance d'une pilule ayant les mêmes effets sur les humains que sur ses souris de laboratoire».

«Nous ne sommes qu'au tout début d'une recherche» dont il compare la difficulté au fait de «gravir une très haute montagne».