Une recherche sur le sida en Allemagne suscite de grands espoirs. Une équipe de médecins a réussi à éliminer toute trace du VIH chez un patient en pratiquant une greffe de moelle osseuse. Cette découverte laisse entrevoir de nouveaux traitements contre la terrible maladie, estime le Dr Réjean Thomas.

«C'est une des plus grandes découvertes dans l'histoire du sida depuis longtemps», croit le médecin, qui dirige la clinique L'Actuel, à Montréal.

Le patient est un homme de 42 ans qui habite Berlin. Il a contracté le VIH il y a une décennie et suivi une batterie de traitements pour empêcher le virus de se développer.

Après quatre ans, il a contracté la leucémie. Pour le guérir, une équipe dirigée par le Dr Gero Hütter, hématologue de l'hôpital Charité de Berlin, lui a greffé de la moelle osseuse.

Mais pas n'importe quelle moelle osseuse.

Le donneur portait une rare mutation génétique qui permet à 1% de la population de résister au VIH. Cette mutation du gène CCR5 avait d'abord été observée chez des prostituées kényanes, qui ne contractaient pas le virus malgré des centaines de contacts sexuels avec des séropositifs.

Deux ans après l'opération, le patient n'a toujours suivi aucun traitement antirétroviral pour contrer le VIH. Il n'en a plus besoin: il est devenu séronégatif.

Il est encore trop tôt pour déclarer le patient «guéri», car le virus peut avoir «trouvé refuge» dans des endroits du corps où il serait indétectable. Mais le Dr Thomas est emballé par les travaux du Dr Hütter, dont les conclusions ont été publiées par le New England Journal of Medicine le mois dernier.

«C'est la première fois qu'une personne devient séronégative parce que son système immunitaire parvient à contrôler le VIH», affirme-t-il.

Pas un remède définitif

De là à dire qu'on a découvert un remède définitif contre le sida, il y a un pas. On ne peut envisager des greffes de moelle osseuse pour chaque personne atteinte du VIH. Cette intervention complexe et risquée doit être accompagnée de lourds traitements de chimiothérapie. Un patient sur 20 n'y survit pas.

Il reste que la découverte des médecins allemands ouvre la porte à une série de nouveaux traitements contre le sida. La science pourrait ainsi concevoir des médicaments qui aideront le corps à éliminer le VIH, plutôt que d'attaquer le virus de front.

«On parle de la thérapie génique depuis longtemps dans le domaine du sida, mais ça n'avait jamais rien donné, indique le Dr Thomas. On pourrait arriver avec des traitements qui font que la personne ne pourrait pas être infectée avec le VIH.»

C'est peut-être une excellente nouvelle pour les séropositifs, souligne-t-il. Car le cocktail de médicaments actuels, la trithérapie, entraîne de graves effets secondaires comme le diabète et les maladies cardiovasculaires. La formule est aussi très coûteuse: 20 000$ par patient par année.

Environ 20 000 Québécois sont séropositifs. On estime que trois ou quatre personnes contractent le virus chaque jour au Québec.