Deux premiers cas de mutations du virus grippal H1N1, identiques à celles signalées vendredi dernier en Norvège, ont été identifiés en France chez des patients décédés, mais les autorités sanitaires assurent qu'il n'y a ce stade aucun signe de propagation de ce virus muté.

Ces cas de mutations surviennent dans un contexte d'expansion importante de l'épidémie grippale en France, et alors que les décès se multiplient.

«La découverte de ces mutations entraîne chez nous une très grande vigilance, mais on ne peut pas encore parler d'inquiétude particulière», a déclaré à l'AFP la directrice générale de l'autorité sanitaire française, l'Institut de veille sanitaire (InVS), le Dr Françoise Weber.

«Cette mutation est susceptible d'être à l'origine de formes pulmonaires plus sévères, mais ce n'est pas une certitude», a pour sa part déclaré le directeur général de la Santé Didier Houssin.

L'InVS, qui a annoncé vendredi la découverte de cette mutation, a précisé que les deux patients décédés en France n'avaient pas de liens entre eux et avaient été hospitalisés dans des villes différentes.

Le premier cas de mutation, appelée «mutation 222», a été découvert sur un prélèvement d'un patient décédé en septembre, à la suite d'examens complémentaires, a précisé le Dr Weber. Les Centres nationaux de références testent les virus pour rechercher des mutations éventuelles, un travail «beaucoup plus long» que l'identification du virus grippal, a-t-elle expliqué.

La même mutation 222 a été découverte chez une patiente décédée en novembre. On a retrouvé en plus chez elle une résistance au Tamiflu, la première en France. Cette patiente était immunodéprimée, a précisé le Dr Weber.

La mutation 222 «pourrait accroître les capacités du virus à atteindre le tissu pulmonaire», a-t-il ajouté.

«C'est un facteur de risque, oui il est plus dangereux, mais pour qu'il soit vraiment dangereux, il faudrait qu'il soit capable de passer d'un sujet à un autre», a estimé le virologue Claude Hannoun, professeur honoraire à l'Institut Pasteur, sur la radio RTL.

«Le virus a subi une mutation qui change la façon dont il entre dans les cellules, qui change la façon dont il réagit aux médicaments, donc il ne lui manque qu'une propriété pour qu'il soit vraiment dangereux, c'est de devenir transmissible de façon plus importante que ses cousins, qui n'ont pas muté», a-t-il expliqué.

Les trois spécialistes s'accordent à dire que les vaccins restent efficaces contre le virus muté.

«C'est une raison supplémentaire pour se faire vacciner rapidement avant que ce virus supplémentaire ne trouve le moyen de s'échapper et de devenir plus invasif», juge le Pr Hannoun.

Vendredi soir, la ministre française de la Santé Roselyne Bachelot a appelé «au civisme de chacun» pour permettre aux personnes les plus fragiles (enfants en bas âge, femmes enceintes, malades) de se faire vacciner dans l'ordre de priorité établi par le gouvernement, alors que les Français affluent dans les centres de vaccination.

En France, 30 nouveaux décès ont été recensés en moins de dix jours, portant à 76 le nombre de personnes décédées en métropole (c'est-à-dire sans compter les départements et territoires d'outre-mer) depuis le début de l'épidémie.

Le nombre de victimes a également fait un bond spectaculaire en Europe avec une progression de plus de 85% en une semaine, atteignant «au moins 650 morts», selon le dernier bilan de l'Organisation mondiale de la santé (OMS).