Les estimations actuelles chiffrent la valeur de la production agricole mondiale des pollinisateurs à environ 250 milliards $. La biologiste Melanie McCavour de l'Université de Concordia cherche à faire davantage reconnaître la valeur économique du travail effectué par les abeilles et autres créatures pollinisatrices.

Mme McCavour a soulevé ce problème auprès de la Commission nord-américaine pour la coopération environnementale en présence des trois ministres fédéraux de l'environnement du continent, le mois dernier à Montréal.

Cette question est l'un des dossiers présentement examinés par la Commission dans le cadre de son mandat de surveillance de l'impact environnemental de l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA).

Mme McCavour a indiqué vouloir ne pas seulement protéger la diversité de pollinisation dans le cadre de l'ALENA, mais désire également qu'une étude soit réalisée pour déterminer la valeur monétaire exacte de ces pollinisateurs au sein de l'économie.

Les estimations actuelles chiffrent la valeur de la production agricole mondiale des pollinisateurs à environ 250 milliards $.

Assigner une valeur monétaire tangible au service de pollinisation est la première étape pour établir un protocole pour protéger les créatures qui y travaillent. La logique veut que si les individus réalisent la valeur du travail des abeilles, des chauves-souris, des oiseaux, des coccinelles et des papillons, les décideurs politiques seront davantage portés à développer de meilleures politiques environnementales et agricoles.

Toute alternative aux pollinisateurs naturels, comme le fait d'avoir un nombre incalculable d'humains oeuvrant manuellement pour répandre le pollen avec des cotons-tiges, serait économiquement impossible, sans mentionner les difficultés physiques insurmontables.

Avec une baisse des populations d'abeilles, Mme McCavour a d'ailleurs appelé à des changements majeurs aux pratiques agricoles et de pollinisation.

L'abeille européenne a longtemps été considérée comme effectuant le gros du travail de pollinisation, mais il existe en fait plus de 20 000 espèces d'abeilles différentes qui répandent le pollen, en plus d'une série d'autres créatures ailées.

On retrouve, parmi les plus efficaces, les abeilles africaines, qui offrent un rendement de 50 pour cent supérieur aux abeilles traditionnelles. Il existe cependant des inquiétudes quant à l'introduction d'espèces non autochtones.

Mme McCavour veut remettre ces peurs en question.

«Un grand nombre d'espèces envahissantes sont pollinisatrices», a-t-elle plus tard expliqué lors d'une entrevue.

Si les insectes sont considérés comme des contributeurs au service de pollinisation, elle a ajouté que la perte d'une ou plusieurs espèces n'était pas nécessairement une mauvaise chose si la nouvelle espèce effectuait le même travail, et de façon plus efficace.

Les leçons apprises lors de l'usage d'une variété de pollinisateurs peuvent également être utilisées lorsque les graines sont semées, incluant la leçon voulant que la diversité soit une bonne chose.

Des plantations agricoles expérimentales ont révélé que cultiver un ensemble de produits côte à côte offrait de meilleurs rendements en raison de la variation des pollinisateurs que les plantes vont attirer.

Cette pratique s'inscrit en contradiction directe de la pratique courante visant à cultiver une seule plante sur une très grande surface, ce qui pourrait contribuer à la diminution alarmante des populations d'abeilles en Amérique du Nord.

Mme McCavour suggère une solution simple : réserver des bandes de terre au sein des plantations pour diversifier les cultures attirerait des pollinisateurs sauvages dans la zone et réduirait la charge de travail des abeilles, a-t-elle dit.