Si Guy Laliberté réalise un rêve en étant le premier touriste canadien de l'espace et le premier clown en orbite, les responsables de l'Agence spatiale canadienne espèrent qu'il acceptera aussi de participer à quelques expériences plus sérieuses.

L'ASC explique que l'astronaute canadien Bob Thirsk, qui est déjà à bord de la Station spatiale internationale, tentera de convaincre M. Laliberté de se prêter à quelques prélèvements sanguins.

«J'ai dit à Guy qu'il était seulement le neuvième Canadien à aller dans l'espace, a expliqué mercredi le grand patron de l'agence, Steve MacLean. Je lui ai dit que nous espérions prélever autant de sang que possible (...) Je ne connais pas tous les détails, mais il semblait prêt à participer.»

Il croit toutefois que le fondateur du Cirque du Soleil en aura pour son argent. «Ca fait des millions d'années que le corps humain s'adapte sur Terre, a-t-il dit. Et de passer neuf nuits en apesanteur, de procurer au corps un état de repos aussi relaxant, ça vaut 35 millions $.»

Guy Laliberté, qui célèbre cette année son 50e anniversaire de naissance et le 25e de celui de son entreprise, s'est envolé avec succès vers la Station spatiale internationale (SSI) à bord d'une fusée Soyouz TMA-16 tôt mercredi matin, à partir de la base de Baïkonour, au Kazakhstan.

Le décollage s'est déroulé sans encombre, peu après 3h (HAE). Quelques minutes après le décollage, M. Laliberté a regardé la caméra située dans la fusée et a dit à l'équipe au sol se sentir «super».

La capsule doit voyager pendant deux jours avant de s'arrimer à la station spatiale, vendredi matin.

Le milliardaire québécois est accompagné à bord de Soyouz de deux astronautes, l'Américain Jeffrey Williams et le Russe Maxim Souraïev qui, eux, resteront dans la station jusqu'en mars.

Avant de prendre place dans la fusée, l'homme de cirque a prévenu qu'il comptait bien apporter son humour avec lui dans les cieux. Joignant l'acte à la parole, il a apporté avec lui des nez de clown destinés à l'équipage de la Station spatiale.

«J'ai promis que j'allais planter autant de nez de clown que possible dans l'espace, a-t-il expliqué en conférence de presse avant le départ. Alors les étoiles ne seront plus seulement brillantes, dorénavant, elles seront aussi colorées.»

Signe que l'enthousiasme de l'amuseur public est contagieux, les trois hommes sont entrés à bord de la capsule en entonnant la chanson populaire «Mammy Blue», écrite en 1971. Ils ont ensuite traversé une foule enjouée qui les a applaudis en leur souhaitant «bon voyage».

Sa famille et ses amis ont assisté avec anxiété au décollage. Ils ont applaudi à l'annonce de la mise en orbite sans encombre du vaisseau spatial, scandant «Guy! Guy!», avant de reprendre la chanson d'Elton John Rocket Man. Plusieurs d'entres eux arboraient déjà un nez de clown.

Steve MacLean, qui a assisté au décollage en compagnie des parents de Guy Laliberté, a dit qu'ils étaient étonnamment calmes et qu'ils rayonnaient de fierté.

Son épouse, l'ancien mannequin Claudia Barilla, a affirmé être très heureuse pour lui. «C'est exceptionnel, a-t-elle déclaré à Baïkonour. Maintenant, nous savons qu'il est là-haut.» Guy Laliberté a décidé de faire ce voyage «pour s'amuser, mais surtout pour réaliser un rêve d'enfant», selon Mme Barilla.

«Dans ma vie, j'ai fait beaucoup de choses amusantes, folles et aventureuses, mais c'est vraiment la plus grande aventure dans laquelle je me suis jamais embarqué», avait expliqué le voyageur de l'espace à l'Associated Press lundi. «Je ne suis pas un scientifique, un docteur ou un ingénieur. Je suis un organisateur, un homme de spectacle et un créateur.»

Le chanteur Garou, un ami de M. Laliberté, était aussi présent à Baïkonour. «Je suis encore plus fasciné que je ne le pensais», a-t-il commenté.

Celui qui se plaît à être le «premier clown dans l'espace» doit séjourner neuf jours à bord de la Station spatiale internationale. Il reprendra le chemin de la terre ferme le 10 octobre avec deux astronautes ayant terminé leur séjour dans l'espace.

Guy Laliberté, qui a fondé l'organisation One Drop, entend utiliser son voyage pour sensibiliser les populations aux enjeux de l'eau sur la Terre. Pour ce faire, il a organisé un «spectacle planétaire» qui se déroulera le 9 octobre et au cours duquel, notamment, sera lu un conte poétique écrit spécialement par l'écrivain québécois Yann Martel.

Guy Laliberté a déboursé 35 millions $ US afin de prendre part à ce voyage inusité. Sa fortune personnelle est évaluée à 2,5 milliards $ US.

Une telle visite payante ne devrait pas se reproduire dans l'immédiat. Les Etats-Unis vont bientôt mettre un terme à leurs vols de navettes, qui partiront à la retraite. Les fusées russes seront alors le seul moyen d'accéder à la SSI, et les responsables des programmes spatiaux auront alors vraisemblablement d'autres priorités que d'acheminer des touristes vers la station internationale.