Une galaxie vient de battre le record du plus ancien et lointain objet observé dans l'univers, selon une équipe d'astronomes français et britannique qui a analysé sa faible lueur émise voici plus de 13 milliards d'années, soit quelque 600 millions d'années après le Big Bang.

Captés par nos télescopes après avoir voyagé à la vitesse de la lumière (300 000 km/seconde) pendant plus de 13 milliards d'années, les rayons ultraviolets émis par une des premières galaxies nous renseignent sur l'enfance de l'univers. Regarder loin dans l'espace, c'est entrevoir le passé.

Matthew Lehnert (Observatoire de Paris) et ses collègues ont utilisé le Very Large Telescope (VLT) installé au Chili par l'Observatoire austral européen (ESO) pour analyser finement la lumière d'une galaxie très lointaine repérée plus tôt avec le télescope spatial Hubble et confirmer ainsi son âge.

Avec l'expansion de l'univers, les galaxies s'éloignent les unes des autres et les rayonnements qu'elles émettent voient leur longueur d'onde s'allonger. Ce décalage vers le rouge («redshift») sert d'étalon pour mesurer la longueur du voyage de la lumière. Plus il dure longtemps, plus le «redshift» est grand.

Après avoir observé pendant 16 heures la galaxie dénommée UDFy-38135539, les astronomes ont constaté qu'un rayonnement caractéristique (Lyman alpha) de l'hydrogène nous parvenait avec un redshift record de 8,6. Le rayonnement a été détecté dans l'infrarouge à une longueur d'onde de 1,16 micron alors qu'il avait été émis dans l'ultraviolet à une longueur d'onde de 0,12 micron.

Cette galaxie est «l'objet le plus lointain dans l'univers, jamais observé jusqu'à présent», déclare M. Lehnert, premier auteur de l'étude publiée mercredi par la revue scientifique Nature.

«Nous constatons que nous la voyons lorsque l'Univers avait moins de 600 millions d'années», ajoute-t-il dans un communiqué du Centre national français de la recherche scientifique (CNRS).

Avec le décalage vers le rouge de 8,6 confirmé pour cette galaxie, le précédent record (8,2) attribué, en 2009, à un «sursaut gamma» - flash ultralumineux signalant l'explosion d'une étoile massive- est battu.

Parmi les cinq galaxies très lointaines détectées par le télescope Hubble, deux autres sont en cours d'observation grâce au VLT et au spectro-imageur SINFONI pour déterminer avec précision leur âge, a précisé à l'AFP Nicole Nesvadba (Institut d'astrophysique spatiale/Université de Paris-Sud), co-auteur de l'étude publiée mercredi.

Les astronomes cherchent à comprendre comment sont apparues les premières galaxies et comment s'est achevé «l'âge sombre» de l'univers lorsque la lumière de ces galaxies a réussi à percer le brouillard environnant d'hydrogène.

Les premières étoiles auraient pu s'allumer seulement 400 millions d'années après le Big Bang. Mais des nuages de gaz absorbaient leur lumière tel un brouillard.

Pour que la lumière des premières galaxies puisse s'échapper dans l'univers et parvenir jusqu'à nous, il a fallu qu'elles rayonnent d'abord suffisamment d'énergie pour ioniser l'hydrogène alentour. L'espace est alors devenu transparent.

«C'est la première fois, relève Mme Nesvadba, que nous savons à coup sûr que nous observons une des galaxies ayant percé le brouillard qui remplissait l'univers depuis le Big Bang».