L'exploration spatiale franchira en février une nouvelle étape. Le premier vaisseau cargo privé amènera un chargement à la station spatiale pour le compte de la NASA. L'ère post-navette spatiale vient de commencer.

Une entreprise américaine fera le 7 février le premier ravitaillement privé de la Station spatiale internationale. L'annonce, faite la semaine dernière, signifie que les jours où les gouvernements avaient le monopole des vols habités en orbite sont comptés.

La NASA avait en 2008 accordé des contrats à SpaceX et à Orbital Sciences pour le ravitaillement de la station spatiale, en prévision de la mise à la retraite de la navette. Le cargo Dragon de SpaceX, qui a connu son baptême de l'air il y a un an, est en avance d'au moins six mois sur le cargo Cygnus d'Orbital Sciences. En février, Dragon fera un test d'approche et d'arrimage à la Station spatiale, avec à son bord du ravitaillement non essentiel en cas de pépin.

«Au départ, Dragon devait faire les tests en deux vols différents cet automne», explique John Logsdon, politologue spécialiste de l'espace à l'Université Georgetown à Washington. «Il y a eu des retards, peut-être à cause de problèmes technologiques, peut-être à cause d'un conflit d'horaires avec les cargos russes Progress. Alors les deux vols ont été fusionnés. Si l'approche ne fonctionne pas selon les règles de la station spatiale, la mission sera annulée et il n'y aura pas d'arrimage. Mais si tout va bien, les vols du contrat pourront se poursuivre.» La NASA a accordé 1,6 milliardUS pour 12 vols cargo à chacune des entreprises, en prévision de la fin de la carrière de la navette l'été dernier.

Étape décisive

La mission de février sera une étape décisive dans la privatisation de l'espace. «Jusqu'à présent, le secteur privé se limitait à envoyer des satellites en orbite, dit M. Logsdon. Il pourra maintenant y avoir plusieurs domaines d'activité indépendants des gouvernements, la réparation des satellites, le ravitaillement des stations habitées, le tourisme spatial et même les vols d'exploration.

« Dragon et Cygnus tirent profit, chacun à leur manière, des forces des programmes gouvernementaux existants. SpaceX s'est appuyé sur l'industrie américaine sous-tendant les lancements de satellites pour faire ses propres composantes. Orbital Sciences utilise un moteur soviétique des années 60, un premier étage ukrainien et une capsule italienne dérivée d'un module de la station spatiale.»

Dragon a une capacité supérieure au cargo russe Progress, mais inférieure aux cargos européens ATV et japonais HTV. En prévision de cette expansion de ses activités, SpaceX a agrandi ses ateliers de Cape Canaveral en Floride et prévoit construire une base de lancement pour gros porteurs sur une base militaire californienne, Vandenberg.

Le fondateur de SpaceX, Elon Musk, qui est l'inventeur de PayPal et de la voiture électrique sport Tesla, a annoncé son intention de continuer le développement de capsules privées jusqu'à arriver à une mission martienne. SpaceX est l'une des quatre compagnies choisies plus tôt cette année par la NASA, parmi 22 candidates, pour mettre au point une capsule habitée permettant de convoyer des astronautes vers la Station spatiale.

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Lancement d'une fusée à partir d'un avion

Après le tourisme spatial, le lancement de satellites. Le cofondateur de Microsoft, Paul Allen, a dévoilé hier un nouveau projet spatial, Stratolaunch. Il s'agit encore une fois de lancer une fusée à partir d'un avion, comme pour le projet de tourisme spatial suborbital pour lequel M. Allen s'est associé à la compagnie aérienne Virgin. Mais comme les fusées amèneront des satellites en orbite en bonne et due forme, le nouvel avion devra être énorme, avec six moteurs de Boeing 747.

John Logsdon, politologue à l'Université Georgetown, indique que cette approche est déjà utilisée depuis 1990 par la société Orbital Sciences (la fusée décolle de sous un bombardier B-52), mais que la charge utile du Stratolaunch est beaucoup plus élevée, 6000 kg au lieu de 500 kg. Le premier essai est prévu pour 2016.